Dès l'enfance, Jean-Marie Paresys a été concerné par l'art : il a étudié le violon, et est entré en poésie avant de commencer à dessiner. Et, si, à l’adolescence, il a renoncé au violon pour se lancer à temps plein dans les études, la poésie ne l’a jamais quitté. Elle a même pris une place si importante qu’il la conjugue souvent avec sa création picturale : elle lui permet alors d'exprimer toutes les nuances psychologiques qu'il ne peut ou ne sait pas "dire" dans sa peinture.

Néanmoins, c'est son œuvre peinte qui prime dans sa vie. Pendant plusieurs années, n'ayant pas envie de s'appuyer sur des formes précises, il a réalisé à l'encre de Chine, des œuvres abstraites, jetées sur le papier comme autant d'instantanés, qui satisfaisaient sa main et son sens esthétique, mais ne l’emmenaient pas de façon pérenne au bout de ses pensées.

 

          C'est pourquoi il en est venu à la figuration. Et, bien que retournant parfois à des dessins informels qui font désormais l'effet d'exercices de style, elle est définitivement son mode d'expression : Une expression encore exploratoire puisqu'il traite aussi bien de fleurs que de volcans, d’animaux que de personnages. Mais, quel que soit le thème abordé, il a d’ores et déjà, une façon bien à lui d'exprimer l'essentiel. Ainsi, dans "Chevaux à Auteuil" montre-t-il deux têtes légèrement décalées suggérant que les animaux sont en plein élan pour la première place. Mais leurs corps ne sont pas "sur" le tableau. A leur place, l'artiste a lancé de grandes projections de peinture rouge qui, mieux que les anatomies, disent –et de façon bien plus originale- l'effort intense auquel ils se livrent ! De même, lui suffit-il de créer un léger déséquilibre des épaules de son "Arlequin", pour générer une impression de mouvement du corps vers la balle roulée à ses pieds, etc.  

          Néanmoins, à regarder ses œuvres, il est évident que l’intérêt de Jean-Marie Paresys, va surtout aux visages. Travaillant des fonds informels à grands traits de pinceau, de façon à créer des matités sous-jacentes, il place au centre du tableau, avec juste une amorce de cou, une tête nantie d'un élément qui rendra immédiatement reconnaissable la définition sociale du personnage : une couronne pour la Reine, d'épais cheveux noirs tressés pour une Gitane, une auréole étoilée pour la Vierge, une couronne d'épines pour le Christ en souffrance ou des symboles crucifères lorsqu’il est triomphant…

          La silhouette ainsi déterminée, l’artiste élabore longuement « la chair », passant couche après couche de peinture. Sur cette infrastructure dont la densité va les mettre en valeur, il pose la bouche en arcature très prononcée, le nez telle une arête brutale ; et surtout les yeux dont la pupille noire au centre d'un cerne incertain, transmet à l'ensemble une telle charge psychologique que l'observateur a immédiatement conscience des états d'âme du sujet. Subséquemment, de ceux de Jean-Marie Paresys au moment où il les a peints.

L’investissement de l’artiste est si fort, en effet, qu’il est facile, au seul vu du tableau, d’imaginer la profonde communion entre lui-même et l’individu dont il définit l’unicité. Parfois, il va même si loin dans l’élaboration, que ce visage perd de sa netteté ; comme si le peintre était tenu, par quelque afflux de mal-être existentiel, de montrer/cacher à la fois, les traits définitifs. Dire et se taire, en somme. 

Et, du fait de cette grande sincérité qui l’anime, Jean-Marie Paresys est l’auteur d’une œuvre peut-être pas encore tout à fait mature, peut-être encore un peu naïve, mais déjà très personnelle ; dont les thèmes récurrents et la facture expressionniste traduisent son besoin impératif d’imprimer sa trace par un questionnement sur la Vie, sur Dieu, sur ses propres origines. Comment s’étonner, pour lors, que le poète rejoigne si souvent le peintre ?

Jeanine RIVAIS

 

CE TEXTE A ETE PUBLIE DANS LE N° 75 TOME 1 DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FANCOIS OZENDA