VOYEZ COMME ON DANSE

 de JEAN D’ORMESSON

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          ** Peut-être peut-on excuser le style pompeux comparable à celui du XIXe siècle ? Cet auteur issu de ce qu’il est convenu d’appeler les "Grandes Ecoles" n’en connaît sans doute pas d’autre ? Il est évident qu’enfermé dans sa classe sociale (le livre entier en témoigne), il n’écrit que pour elle, et qu’il n’a jamais tenté aucune ouverture sur un autre monde que le sien.

    En conséquence, à part ceux des autres classes habitués de "Gala" ou autre "Voici"… nul  ne s’intéresse à cette évocation d’un autre temps !

 

   ** Comment excuser, par contre, le vide complet de ces 388 pages d’autosatisfaction ! "Regardez comme je suis important et l’ai toujours été !", susurre l’auteur ! "Et puis, tous ces gens-là mentent, je suis le seul" -sauf quand même, noblesse oblige, celle qui a été sa maîtresse- "à être sincèrement effondré de la mort de "mon" ami…" 

          En conséquence, le lecteur passe en une revue insipide tous les gens présents, influents bien sûr, célèbres à tout le moins, avec leurs défauts, rarement leurs qualités, leurs travers, leurs histoires conjugales ou extraconjugales… Nous nageons en pleins Potins de la Commère !

          Et il faut bien convenir que, (quoique écrit rétrospectivement, cet ouvrage témoigne de l’état d’esprit d’un moment) par cet interminable défilé de personnes, Jean d’Ormesson donne une piètre idée de son recueillement face à une mort supposée l’affecter gravement : En fait, il a bien un œil sur la tombe où descend "son" ami, mais l’autre, féroce,  est sur ses pairs. Sans parler du fait que ce défilé est son ultime trahison aux dernières volontés de Romain qui souhaitait disparaître dans l’anonymat.

 

          **Impossible encore de pardonner la centaine de pages de digressions qui n’apportent RIEN à ce livre (géographie des îles grecques, attentat contre Hitler, explication du Big-Bang, la Mafia américaine, etc.) Tout ce qui, dans cet ouvrage, est fatras destiné à étayer du vide, a été avec intérêt lu ailleurs. 

          Il s’agit là d’un étalage complaisant, fat et creux qui plus est inutile, de connaissances. 

        Nous sommes loin d’une littérature à la Céline où chaque mot est tellement impossible à couper que la moindre distraction oblige à reprendre le paragraphe.

Peut-être que si Jean d’Ormesson s’était relu avec modestie, et avait pris ses ciseaux, son histoire sur la perte d’un être cher aurait été intéressante : tel qu’il est, le livre se parcourt en diagonale !

 

          **Enfin, même le titre "Voyez comme on danse" est mensonger : En le lisant, chacun pense immédiatement à la danse avec la mort, bien sûr. Lui viennent en tête ces formules, terribles de concision, en relation avec cette mort… 

Or, lorsque l’auteur l’emploie p. 352, il dit : "Le plus curieux, le plus intéressant, était que ce même Gérard qui me donnait des leçons, devait, voyez comme on danse, entrer lui aussi dans la ronde", c’est-à-dire pendant deux ans dans le gouvernement de Mitterrand. Nous sommes dans la comptine, pas dans la mort !

 

          Bref, il s’agit de la recette parfaite de ce que je déteste : des potins mondains émaillés de culture. Juste assez de gens célèbres pour se pousser du col : être snob sans en avoir l’air !

Et je conclurai qu’il s’agit là d’une publication ennuyeuse et inutile !

Jeanine RIVAIS

 

VOYEZ COMME ON DANSE de Jean D' Ormesson : Les Editions Retrouvées Juin 2012