MONIQUE BALLIAN, sculpteur, DITE NOIZETTE

ENTRETIEN AVEC JEANINE SMOLEC-RIVAIS

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Il est rare qu'un entretien se déroule dans une telle bonne humeur, avec de si fréquents éclats de rire ! Je vous conseille donc d'aller visiter le site de cette artiste, mais pas avant d'avoir lu son "Avertissement" !(ci-dessous).

Blog :http://www.noizette.com/

Site : http://ballian.arts-sud.com/

"Attention ! ce blog présente des images qui peuvent heurter l'insensibilité de certaines et de certains, hélas majoritaires; il est donc interdit aux vieux (et aux jeunes) grincheux, aux snobs et aux adeptes de l'art conceptuel hermétique. Les autres : éternels enfants, adolescents attardés, rêveurs insoumis, artisans mes frères, vieilles petites filles mes sœurs, soyez les bienvenu(E)s chez Noizette".

 

 

La planète GAGAVIR
La planète GAGAVIR

Jeanine Smolec-Rivais : Monique Ballian, il y a longtemps que vous menez de front peinture et sculpture ? Et que vous travaillez, apparemment, sur plusieurs thèmes simultanés ? Les menez-vous ensemble selon votre inspiration ? Ou de façon circonstancielle ?

Monique Ballian : J'ai un thème : mes sculptures habitent toutes sur la planète Gagavir. J'ai écrit une histoire et, la plupart du temps, c'est à partir du texte que me vient la sculpture.

 

J.S-R. : Mais sur votre planète, les animaux n'ont rien d'étrange. Ils sont à l'image des animaux terrestres ?

M.B. : Oui, à part les couleurs qui sont fantaisistes. Et parfois les formes. Ce ne sont quand même pas de vrais animaux terrestres.

 

Chrys
Chrys

J.S-R. : Qu'est-ce qui vous a donné l'idée de partir sur une planète lointaine ?

M.B. : Sans doute la planète Terre m'ennuyait-elle à mourir ! J'ai dû me dire que je serais mieux ailleurs, et que le mieux était encore de me faire ma propre planète !

 

J.S-R. : Si je regarde autour de nous, je vois des têtes, des corps, des humanoïdes et des animaux. Comment faites-vous cohabiter ces éléments incomplets avec ceux qui le sont ? Parce qu'en plus, j'aperçois une femme qui sort d'un œuf, ce qui suggère que le mode de reproduction sur votre planète n'est pas identique au système terrestre ; et qu'il doit s'agir d'une "alien" ?

M.B. : C'était une période particulière où je travaillais la terre. Et cette femme est un symbole de renaissance. C'est un peu une chrysalide, et j'espère qu'elle va s'envoler. C'est pourquoi elle s'appelle Chrys".

 

J.S-R. : Je vois donc tous ces éléments animaux ou humains tranquillement installés sur votre étagère. Mais vous arrive-t-il de les mettre en scène, de les faire réagir, en somme d'animer les pages de votre histoire ?

M.B. : Les mettre en scène, oui. Certains ne sont d'ailleurs pas encore sur la planète. Par exemple, nous avons la reine Gougoupe sur la planète. Il y a la reine "avant" les yeux fermés, et la reine très en colère, nouvelle version. Parce qu'entre temps, la planète Gagavir a explosé, donc tout le monde a dû se réfugier sur la planète Terre, ce qui les a beaucoup énervés. Mais finalement, ils ont retrouvé une autre planète qui s'appelle la planète Goulblik, et tout le monde est reparti "là-haut" !

 

L'Ardeuchoise de la reine Gougoupe
L'Ardeuchoise de la reine Gougoupe

J.S-R. : D'où la voiture ! Je me demandais ce qu'elle faisait là ! Vous avez donc l'hippo Jojo qui, lui aussi, est très en colère ?

M.B. : Donc, au début, ils sont allés sur la planète Terre pour essayer de faire sourire les Terriens. Qui ont toujours un caractère de cochons et qui font toujours la gueule ! Bien sûr, à la fin, ils n'y arrivent pas ! Les Terriens sont irrécupérables !

A leur arrivée sur la planète Terre, ils ont été accueillis comme des manants. Mon pauvre Jojo était enfermé dans sa boîte en carton. D'où sa colère.

 

J.S-R. : Que s'est-il passé, pour que cette planète explose ?

M.B. : Ce sont les méchants Terriens qui l'ont fait exploser !

 

J.S-R. : Vous devez bien vous amuser, d'abord en créant ce conte… Parce qu'en fait, c'est un conte ?

M.B. : Oui, c'est un conte. Un conte sans fin.

 

J.S-R. : L'avez-vous publié ?

M.B. : Il est sur Internet, mais je ne l'ai pas publié au sens habituel du terme, sur papier.

 

J.S-R. : Vous êtes donc la Princesse des Mille et une nuits !

M.B. : Non ! Je suis la reine Gougoupe, évidemment ! De sorte que personne ne me contrarie !

 

J.S-R. : Mais, vos sujets ne vous demandent-ils jamais des comptes, quand votre planète explose, par exemple ? Vous partagez leur triste sort lorsqu'ils sont obligés de se réfugier sur la planète qui a fait exploser la leur ? Ou vous continuez d'être la Reine ?

M.B. : Evidemment, non! Je les soutiens, et je vais dormir dans le carton !

 

Les mutations de la reine Gougoupe
Les mutations de la reine Gougoupe

 J.S-R. : Tout de même, votre reine qui avait l'air tout à fait noble, avec son sceptre et ses yeux clos, je trouve qu'elle a plutôt l'air d'une fille de cabaret par la suite ?

M.B. : Non ! Elle en a "jusque-là" ! Mais tous ont un air différent, après l'explosion. Ils ont compris qu'ils en ont assez de "se faire marcher sur les pieds". D'où leur énervement !

 

J.S-R. : Quand vous ne travaillez pas sur ce conte et les illustrations, que faites-vous ?

M.B. : Si je fais des têtes seules, ce n'est pas un travail pour le conte. Elles n'en font pas partie !

 

J.S-R. : Sinon, vous poursuivez en permanence le conte et l'illustration ?

M.B. : Tant que j'aurai des idées, oui ! Après, je verrai !

 

Quelques peintures et Torturator I
Quelques peintures et Torturator I

J.S-R. : Et vos peintures ?

M.B. : Non, elles ne font pas partie du conte.

 

J.S-R. : C'est bien ce que j'avais ressenti. Alors, comment les vivez-vous en dehors de votre conte ?

M.B. : Ce que j'aime, c'est toucher à tout ! Tous les matériaux, tout ce qui me passe par la tête !

 

J.S-R. : Je vois aussi une tête qui me semble en pierre ?

M.B. : Oui, en pierre de Dordogne !

 

J.S-R. : Quand vous dites "tiens, je vais travailler à mon conte" (à mon conte !!!), est-ce que vous revenez facilement dans l'histoire ? Ou bien y a-t-il parfois des problèmes de réadaptation ?

M.B. : Quand c'est la période des déclarations d'impôts, ou qu'il y a des problèmes du quotidien terrestre, il m'arrive d'avoir un peu de mal, oui ! Et, d'ailleurs, cela m'énerve ! Ca suffit, la terre !

 

J.S-R. : Et à quel moment vous dites-vous que ce que vous venez de faire ou écrire est bien, que c'est original, et que vous pouvez donc continuer ?

M.B. : Ma règle est que cela doit couler de source ! Si c'est forcé, je laisse tomber !

 

J.S-R. : Mais, à un moment donné, vous êtes bien obligée de faire un choix ? Vous le sentez spontanément ou vous devez méditer dessus ?

M.B. : Ou le texte vient tout de suite ; ou s'il faut réfléchir pendant des heures, je renonce !

 

J.S-R. : Et dès que vous avez trouvé un passage du texte, vous passez à la sculpture ? Ou c'est indifféremment? Ou par périodes ?

M.B. : En ce qui concerne la planète Gagavir, c'est plutôt le texte qui m'inspire la sculpture. Je "vois" le personnage et j'ai envie de le réaliser.

 

l'Hippo Jojo
l'Hippo Jojo

J.S-R. : C'est une démarche très curieuse, parce qu'elle est forcément très littéraire !

M.B. : Oui. Mais au départ, je voulais être écrivain.

 

J.S-R. : Vocation ratée à cause des Terriens ?

M.B. : Non ! Tout simplement, je n'avais pas le talent, le souffle nécessaires ! Ecrire un conte, des petits textes d'une page ou deux, ça va. Mais pour écrire un vrai livre, il faut un souffle que je n'ai pas du tout !

 

J.S-R. : Donc, vous n'avez aucune nostalgie ?

M.B. : Non. Cela me convient, parce que, justement, c'est varié, je ne m'ennuie pas !

 

Pégase, le cheval de l'Olympe
Pégase, le cheval de l'Olympe

J.S-R. : Et vous êtes allée expérimenter ce conte dans des écoles ?

M.B. : Non, pas systématiquement. Une fois, lors d'une exposition, les enfants des écoles sont venus et je leur ai raconté l'histoire. Mais après, cela ne s'est plus refait.

 

J.S-R. : Mais une telle histoire d'extra-terrestres a dû beaucoup leur plaire ?

M.B. : Oui. Beaucoup ont posé des questions !

 

J.S-R. : Et bien nous, nous allons en rester là, sur Gagavir !

M.B. : Non, sur Goulblik, maintenant !

 

ENTRETIEN REALISE DANS L'ANNEXE DES ECURIES DE BANNE, AU COURS DU FESTIVAL BANN'ART, LE 11 MAI 2013.

 

 

Quelques Gagavirois en transit sur la planète Terre
Quelques Gagavirois en transit sur la planète Terre