LES “LECONS D’ANATOMIEDE JEAN BOCCACINO, peintre

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Comment définir les oeuvres de Jean Boccacino, sinon comme les “écritures” picturales fantasmatiques d’un “auteur” un peu surréaliste, traduisant des rêves sériels sur des thèmes aux formulations variables, mais tournant autour de l’homme, avec détails obsessionnels récurrents ?

“Portraits” pseudo-photographiques, ses tableaux proposent chacun un personnage central très stylisé. Pour les oeuvres réalisées à la sanguine, la tête est carrée aux angles arrondis, avec parfois une légère excroissance vers le menton. Comme chez les artistes d’Art-Récup’, le nez est dessiné d’une planche étroite, fixée sur une autre un peu plus large. Et, telles des lunettes de soleil compactes, une barre horizontale traverse le visage, ne laissant voir pour les yeux que deux minuscules points. Comparable à une succession de radiographies, cette série est très “descriptive” des secrets internes fantaisistes de ces étranges homomorphes : l’un a deux coeurs accrochés tels des cerises au sommet d’une tige feuillue ; un autre en a un seul, mais il est au-dessous d’une sorte de panier en accordéon qui a pris sa place dans le buste ; un troisième est à droite, couvert d’une croix potencée, etc. Quelle que soit l’invraisemblance ou la connotation acrobatique de leur situation géographique, tous ces coeurs sont reliés à la bouche par de très raides “vaisseaux sanguins” : pour transmettre directement –à l’intention de qui ?- l’intensité de leurs battements ? Plus explicite encore, l’un des personnages de Jean Boccacino révèle dans son entièreté son anatomie avec amples précisions, de l’estomac bien rebondi à l’intestin fait d’un broc horizontal, jusqu’au sexe (féminin) représenté par un cauris vertical bordé de longs cils !

Moins “scientifique”, plus poétique, une deuxième série, en couleurs, propose des visages au long nez à profil grec, tantôt émergeant à la manière d’un donjon au-dessus des remparts d’une ville aux cheminées qui fument ; tantôt portant tatoué sur une joue, son double ? son ange gardien ? son enfant ? Ou encore, parfois, tête-masque créée assurément une nuit où Jean Boccacino s’était mué en un sculpteur cubiste, nez d’un côté, oeil de l’autre... abritant sous les revers de sa cape, un chien à visage humain !

Etrange fantasmagorie, où le peintre, d’un trait fin exempt d’angles durs, hésite entre angoisse et malice, entre humour et sérieux, entre réalisme et illusion !

Avec, chaque fois, rassurant comme un coussin douillet qui isolerait du monde son personnage, un large cadre, complément apparemment indispensable de cette sorte de carte d’identité. Finement ouvragé, il s’impose dans des nuances ton sur ton de blancs mats évoluant jusqu’à des bruns pâles. Ou bien, comme sur les parois d’un mastabah, y sont dessinés symétriquement de souples cariatides aux formes accusées, des espèces de lézards tirant de longues langues courbes, des animaux érigés ou des oiseaux à bec puissant...

Quel âge a donc Jean Boccacino, qui dessine ainsi de façon si naïve ses “voyages fantastiques” miniaturisés ? L’âge, sans doute, où le talent aidant, un artiste peut s’amuser sans complexes de l’étonnement et la perplexité suscités par ses oeuvres où sont étalées au grand jour ses intimités corporelles et cérébrales... très fausses... pour des... leçons d’anatomie... bien belles... et provocatrices !

Jeanine Rivais.

CE TEXTE A ETE ECRIT EN 1999, APRES LE IVe FESTIVAL HORS-LES-NORMES DE PRAZ-SUR-ARLY. IL A ETE PUBLIE DANS LE N° 67 DE JANVIER 2000 DU BULLETION DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA.

Quelques liens concernant Jean Boccacino :

http://artelier.hautetfort.com/   (son atelier depuis 15 ans avec des adultes handicapés mentaux, voir le livre qu'il vient de publier, ci-dessous)

 

BLOGS PEINTURE

http://boccacino-galerie.blogspirit.com/

http://circus.hautetfort.com/

LIBRAIRIE : Référence de son livre "CIRQUES ET MADONES".

http://fr.blurb.com/bookstore/detail/1606266

http://fr.blurb.com/bookstore/detail/1701848

http://fr.blurb.com/my/book/detail/2592750

http://www.lelivredart.com/bible-singuliers-2010.php   (page 80)