LES COUPLES DANSANTS DE JEff ROLAND

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      Est-ce bien un couple, sur chacune des œuvres de Jeff Roland, qui plus est un couple dansant ? La réponse est tantôt "oui" sans ambiguïté ; d'autres fois "peut-être". Pourquoi deux réponses possibles ? Elles tiennent tout simplement à la façon dont il les traite ! 

 

          L'artiste emploie des couleurs fanées, comme éteintes, qui donnent une élégance tranquille à ses toiles, avec des fonds délavés, traités à grands coups du pinceau de façon à en supprimer l'unité ; et des couleurs allant des violines aux bleus ; des gris avec une pointe de rouges, des ocres de toutes nuances. Il y a rarement de profondeur dans ses oeuvres, jamais de perspective, tout se passe au premier plan ; ce qui pourrait être des espaces étant occupé par des objets (chaises en lévitation, triangles, amorces de toitures, etc.) ou par des animaux (chats, biches, chiens, etc.). 

          Pourquoi, alors, cette hésitation à définir le sujet de ses créations ? Pas de problème si le couple est en teintes foncées sur gris. Mais s'il en va à l'inverse, les nuances d'ocre prennent une telle importance que le couple se retrouve légèrement en arrière. Ou lorsque la femme danse, que l'homme se retrouve en off ou à peine ébauché, et qu'elle est ton sur ton avec le fond, là encore, le doute est possible ! On pourrait ainsi épiloguer longuement sur ces quelques possibilités. 

 

Ce thème du couple semble donc récurrent, les personnages n'étant pas  simple motif esthétique, canon de beauté idéal, mais stylisés, extrêmement découpés, délinéés, comme appliqués sur la toile, à se demander, justement, s'il ne s'agit pas de collages ; avec parfois une "vraie" main qui se détache, un tatouage qui orne une cuisse… Les "clairs" légèrement détourés par un fin trait de bistre… Et de ce fait, n'est-ce pas un paradoxe de trouver les personnages tellement mobiles alors que le fait de les recadrer leur donne une densité, un poids qui devraient contredire cette impression ? 

          D'autant que l''ensemble est tellement serré, qu'il génère un sentiment d'enfermement, une impression de drame qui sourd pourtant alors que jamais aucune tragédie ne se joue dans ses toiles et s'il a inconsciemment en lui le sens du tragique, la théâtralité et les effets de matière, il s’en écarte en se donnant une lueur d’espoir, grâce à ses talents de coloriste déjà évoqués, à la conjonction de ses couleurs qui donnent, second paradoxe, à ses oeuvres une connotation de chaleur, de grande convivialité et de vie.

 

          Déclinant souvent les mêmes modèles, l'artiste semble traiter de scènes qui pourraient appartenir à des contes commençant tous par : "Il était une fois un homme et une femme…". Mais il les réplique dans différentes situations et positions : sur un tableau, l'homme est très cambré, tandis que la femme, droite, se contente de danser à petits pas ; sur un autre, il lance les jambes de part et d'autre comme le font les danseurs russes, tandis que, statique, elle le regarde ; sur un autre encore, c'est elle qui danse vêtue d'un simple tutu, tandis qu'il semble s'être éloigné d'elle ; sur un autre enfin tous deux se tiennent par la main et virevoltent…

 

      Tout se passe donc comme si, désireux de rendre des souvenirs vivaces rémanents, des impressions brèves fouettant comme des flashes son imaginaire, le peintre souhaitait garder les caractères essentiels de l’être humain ; et, en toute simplicité, les restituait sur sa toile ! Il offre de ce fait au visiteur, une oeuvre puissante et singulière ; qui, surtout, par son chromatisme, sa stylisation font de lui l’auteur talentueux d'une poésie picturale harmonieuse, .d’un univers fantasmatique, riche et personnalisé. 

Jeanine RIVAIS

TEXTE ECRIT SUITE AU BIZ'ART FESTIVAL 2017 DE HAN-SUR-LESSE EN BELGIQUE.

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JEFF ROLAND'S DANCING COUPLES

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          Are they really a couple on each of Jeff Roland's pictures, all the more a dancing couple ? The answer is sometimes unambiguously "yes" ; other times "may be". Why two possible answers ? They quite simply come from the way he treats them !

          The artist uses faded colors ; almost dead, which give his works a quiet elegance with washed out backgrounds, treated with long brushstrokes so as to suppress its unit ; and colors from purples to blues ; greys with a touch of reds, all shades of ochres. Seldom is there any depth in his works, never any perspective. Everything lies in the foreground, what might be open spaces being occupied by things (levitating chairs, triangles, beginnings of roofs, etc.) or by animals (cats, does, dogs).

          So, why such hesitation to determine the subject of his creations ? No problem if the couple is in dark shades of grey. But, if the opposite is true, the tints of ochre take such importance that the couple seems pushed slightly backward. Or, when the woman dances, when the man finds himself off or hardly outlined, and when she is tone on tone with the background, there again, doubt is possible ! One could thus explore at length these several possibilities. 

 

          This subject of a couple seems therefore recurrent, the characters not being merely aesthetic figures, ideal canons of beauty, but stylized, extremely cut out, outlined, as applied to the canvas, so that one wonders if they are not collages ; with sometimes a genuine hand coming off, a tattoo adorning a thigh… light colors lightly cut out by a thin stroke of brown… thereby, isn't it a paradox to find the characters so moving, when the fact of reframing them gives them a density, a weight that should contradict this impression ? 

          Especially as the whole is so tight, that it produces a feeling of enclosure, an impression of drama which nevertheless springs even though no tragedy is ever played in Jeff Roland's works ; and if he unconsciously has in him a sense of tragic, theatricality and effects of matter, he deviates from them by self giving a glimmer of hope, thanks to his talents already evocated as a colorist, and thanks to the conjunction of his colors which give his paintings, second paradox, a connotation of warmth, great conviviality and life. 

 

          Often expressing the same models, Jeff Roland seems to deal with scenes that could belong to fairy-tales beginning by : "Once upon a time, there were a man and a woman…". But, he replicates them in different situations and positions : On a painting, the man's back sticks out, while the woman, body straight, merely dances with small steps. On another, he sets his legs on both sides, like Russian dancers do, while, motionless, she looks at him. Still on another, she is the one dancing, only dressed with a tutu, while he seems to have got away from her. Lastly, on another, both are holding hands and twirling…

 

          In fact, everything takes place as if, willing to make vivid memories remanent, short impressions spurring like flashes his imagination, the painter wanted to keep human being's essential characters ; and, quite simply, restored them on his painting ! Therefore, he offers to the visitor a powerful and conspicuous work  which, chiefly through its chromatism, its stylisation, makes him the talentuous author of a pictorial, harmonious poetry, of a phantasmatic, rich and personalized universe.

Jeanine RIVAIS