BETES ET GENS, LES CREATURES DE SEBASTIEN LHOST, dit SEBALO

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          Il semble bien que l'œuvre de Sébalo soit un véritable hymne à la vie, humaine et  animale. Et toujours dans un matériau capable de tenir tête au temps qui passe : des métaux. Toutes composantes qu'il découvre au cours de ses glanes ici et là. Et il y a, à l’évidence, chez ce créateur d’Art-récup’, une grande volonté ludique d’être un sage ; de ne pas trop "agir" sur ces avatars métalliques; de composer avec l’usure du temps ; feindre de l’ignorer comme, d’une pirouette on se débarrasse d’une idée gênante ; dénoncer, parallèlement, une civilisation qui rejette ses objets à peine consommés, dans un grand gaspillage de beauté et de sens patrimonial. Créer, en somme, à partir des rejets d’autrui, une poésie personnelle qui ressemble fort à un défi ! D’autant qu’à l’appui de cette condamnation, Sébalo, insuffle à tous ces objets arrachés à la destruction, vie et pérennité.

          Pour chaque œuvre, entrent en jeu la forme et la couleur. Faisant disparaître la rouille pour que chaque élément retrouve les teintes de provenance, ne s'intéressant apparemment pas aux graphismes qu'elle a pu produire en s'installant. Mais leur laissant exactement leur forme d'origine, ce qui l'intéresse étant de les utiliser sans modifications. Comme si, pour lui, c'étaient des morceaux de vie d'un être qu'il prend tels quels, et qu'il commence à associer. 

 

          Ce qui semble l'intéresser, dans ses assemblages, c'est plus le fait de se donner le droit d’échapper à des choses connues, des choses de rigueur. Un visage est défini. Mais, quand on part vers des idées abstraites, il n’y a plus rien de défini, surgit alors ce que l’on a à l’intérieur de soi. Le côté technique, le tracé, la construction se retrouvent dans ce qu'il fait, quelque chose de personnel et de bâti. Pas dans le sens assemblage, soudage des morceaux… Mais au final, un visage, ce à quoi il limite ses créations humanoïdes, semble sans doute pour lui, rassurant. Le fait d'accepter des créations de cette nature, assez structurées, assez précises, lui a permis d’aller vers des choses plus ancrées à l’intérieur ; beaucoup plus libres… 

          Lorsqu'il crée des "humains", il s'arrête aux têtes, comme il vient d'être dit. Masculines toujours ! Le crâne issu d'un pichet peut-être, ou d'un pot ? La bouche en fer à cheval ou simple trou. Le nez/passoire ou carrément raide. De grandes oreilles/porte-voix ou demi-cercles sans fioritures. Des yeux ronds énormes, vairons parfois, lorsque l'un est en étoile et l'autre en ronds concentriques. Chevelure née d'un piège ou de morceaux de ressorts ! Enorme moustache souvent. Aucune restriction consciente, donc, tout est bon qui s'associe avec le meilleur !

 

          Viennent ensuite des animaux, aux formes bizarres. Tels les crabes, leurs terribles pinces faites de clefs à mollette ; des fourmis, des ouvrières sans doute, à cause de leur énorme thorax, armées de toutes leurs mandibules, prêtes en somme, à défendre la fourmilière ! Et puis des coqs, leurs ergots plantés au sol ; les plumes de la queue éparses à tous les vents ; le bec dressé prêt à attaquer ! Pas de gentils insectes ou animaux, en somme, des guerriers à chaque fois !

Des sculptures, donc, très figuratives. Un travail de ligne, de composition entraînant  tout un jeu entre le regardeur et le sculpteur. Un "jeu sculptural" : Sébalo ouvre une porte, et c’est l’imaginaire de chacun qui doit travailler. 

En définitive, ce petit monde stylisé, d’apparence lourde et solide, aux membres raides mais aux allures paradoxalement mobiles, génère une création vivante, tonique et généreuse, pleine d’humour, épisodique et bon enfant qui, au fil des années, ne prend pas une ride. 

Jeanine RIVAIS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TEXTE ECRIT SUITE AU BIZ'ART FESTIVAL 2017 DE HAN-SUR-LESSE EN BELGIQUE.