HOMMAGE A GUY GEYMANN

Qui fut membre actif des EVAsions des Arts

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Guy Geymann présentant sa médaille
Guy Geymann présentant sa médaille

          Enfant, Guy Geymann avait l’habitude de retourner les images qu’il gagnait, pour voir derrière où se trouvait l’épaisseur des personnages qu’il y voyait ? C’est dire que la volonté profonde de considérer le monde en trois dimensions l’a toujours accompagné. Devenu adulte, ses œuvres zoomorphes le ramenaient vers d’ancestrales cultures, vers une humanité qui allait bien au-delà d’une simple création formelle. Quant à ses oeuvres homomorphes, elles revenaient aux sources les plus lointaines, simples "Vénus" ovées, semblant à peine émergées de la glaise originelle ; tandis que d’autres, au bassin lourd et aux rondeurs rassurantes, évoquaient par leur proximité avec la célèbre "Petite Dame de Brassempouy", des maternités tutélaires.

Guy Geymann recevant une médaille des mains de François Sauvadet, député de Côte-d'Or.
Guy Geymann recevant une médaille des mains de François Sauvadet, député de Côte-d'Or.

          Mais il ne fut pas seulement artiste pour lui-même. Participant à des associations, il devint membre actif des EVAsions des Arts. Et actif, il le fut tout du long. Premier invité d'honneur en 2006. Puis, membre de la Commission artistique, il proposa les années suivantes de nombreux artistes dont il appréciait la créativité et qui vinrent enrichir le parcours de chaque manifestation. Son action lui valut d'être médaillé par le député François Sauvadet. Il créa même un Prix qui, pendant quelques années, couronna un jeune créateur, peintre ou sculpteur. 

          Ayant lui-même été invité à des symposiums au niveau international, il œuvra à en créer un avec EVA. Dans cette entreprise, nouvelle pour tous les organisateurs, son savoir-faire fut capital. De même que sa connaissance d'artistes créant des œuvres monumentales et prêts à s'investir dans un festival situé hors des circuits officiels. 

          Les œuvres de ce symposium ayant été installées sur la Voie romaine proche, ses "Sentinelles" veillent désormais sur les randonneurs.

          Hommage lui soit rendu par tous les membres des EVAsions des Arts que la nouvelle de son décès a profondément attristés.

Jeanine RIVAIS

 

CE TEXTE A ETE PUBLIE SUR LE SITE DE L'ASSOCIATION "EVA DES ARTS".

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HOMOMORPHISME ET ZOOMORPHISME chez GUY GEYMANN, sculpteur.

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     Enfant, Guy Geymann avait l’habitude de retourner les images qu’il gagnait, pour voir derrière où se trouvait l’épaisseur des personnages qu’il y voyait ? C’est dire que la volonté profonde de considérer le monde en trois dimensions l’a toujours accompagné. Volonté sans failles, d’ailleurs, puisque dès la fin de l’adolescence, il a fréquenté, outre les Beaux-arts, des ateliers de sculpteurs, apprenant les techniques principales du modelage, de la taille des pierres dures et du coulage du bronze. Mais le caractère onéreux de ces matériaux l’a emmené vers d’autres expériences, en particulier vers des matières de synthèse. D’où l’obligation de décomposer en deux temps les étapes de son travail : d’abord la création en cire ou en terre de la forme choisie, et le moulage dans un support lui-même en terre ou en élastomère. Après cette genèse, vient, opération longue et précise, le polissage des surfaces démoulées.

     Si cette avancée vers une œuvre finie où jouent les brillants et les mats, témoigne d’une tradition perpétuée avec une remarquable technique, elle est chaque fois subséquente à un temps de latence au cours duquel sont en éveil la vigilance, les motivations de l’artiste ; où son esprit erre, suppute, refuse ou au contraire laisse venir à lui des désirs, des rythmes, des enchaînements de configurations, jusqu’à ce que s’établissent entre tous ces éléments une cohérence et une esthétique si évidentes qu’il puisse enfin « commencer » à réaliser la forme s’imposant peu à peu à lui. De ces afflux de forces sur lesquels le sculpteur n’exerce aucune influence, pas plus qu’il ne tente de les expliquer ou de les intellectualiser, découle l’apparence d’une œuvre nouvelle, parfois presque abstraite, d’autres fois proche d’une petite histoire, ou simple silhouette conçue pour le pur plaisir et qui, sans narration, emplira l’espace… 

      Quant aux œuvres homomorphes de ce sculpteur, les unes remontent également aux sources les plus lointaines, simples « Vénus » ovées, semblant à peine émergées de la glaise originelle ; tandis que d’autres aux bassins lourds et aux rondeurs rassurantes, évoquent, par leur proximité avec la célèbre "Petite Dame de Brassempouy", des maternités tutélaires. Œuvres tellement polies, miroitantes, que le spectateur a envie de les caresser, créer avec elles une intimité, suivre leurs replis chauds et soyeux… Car les œuvres de Guy Geymann sont toutes féminines, ces contours et ces saignées parlant à sa main jusqu’au fantasme. D’autres sculptures, par contre, plus culturelles, plus linéaires, très proches de l’abstraction, perdent un peu de leur sensibilité psychologique au profit de leurs harmonies formelles. Mais dans tous les cas, se dégage des œuvres de cet artiste, une grande sensualité : pour l’œil, d’abord, qui s’attarde sur ces enchaînements de sinuosités, de plans tendus et de surfaces polies, sur des jeux d’arêtes et de mamelons… Pour la main, ensuite, qui ressent un véritable plaisir physique à frôler cette douceur… Pour l’esprit, enfin qui, confronté à la récurrence quasi-obsessionnelle de ces formes féminines parfaites, se laisse emporter vers une définition inhérente à cette perfection : la Beauté.

    Mais –et sans doute faut-il y voir un paradoxe- peut-être est-ce ce sentiment même de beauté qui génère une frustration ? Car s’il fait appel à tous les sens, il laisse de côté le cœur… Au fond, qu’importe : la Vénus de Milo, les œuvres de Moore ou de Brancusi… disent-elles "si", "où" et "quand" l’artiste a souffert au cours de leur gestation ? Dans cette harmonie qui les caractérise, sollicitent-elles le cœur du spectateur ? Il semble bien que non. Qu’à partir du moment où un artiste investit son imaginaire, sa créativité dans cette quête d’absolu, il rejoint Saint-Jean de la Croix déclarant : "Pour toute la beauté, jamais je ne me perdrai ; sauf pour un je ne sais quoi qui s’obtient d’aventure". Guy Geymann, apparemment, suit le même chemin à la recherche de ce "je ne sais quoi".

Jeanine RIVAIS

 

CE TEXTE A ETE PUBLIE DANS LE N° 49 DE JUILLET 2003 DE LA REVUE DE LA CRITIQUE PARISIENNE