LES ECTOPLASMES HABITES DE XAVIER MONTERO, peintre

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"Un ectoplasme est une substance, de nature indéterminée, prenant une forme plus ou moins précise, extériorisée par un médium en état de transe. Bien que relatée par de nombreux témoins dignes de foi, l'existence des ectoplasmes n'a jamais été scientifiquement démontrée".

 

        Et pourtant, ceux de Xavier Montero existent bel et bien. Informes, protéiformes, conformément à la définition. Très colorés, polychromes, pour corroborer ses influences ancestrales sud-américaines. Et chaque "scène" ressemble à un rêve dont il essaierait de restituer une cohérence en tentant de conjurer picturalement des obsessions fragmentaires ; « retrouver » un à un sur la toile, les chaînons manquants ; reconstituer à partir de ce non-sens le sens de ses rêves. Tout se passe comme si, de ces surfaces aléatoires, il voulait faire émerger peu à peu, une sorte de Golem. Pour ce faire, l’artiste en vient, à force de superpositions irrégulières de sous-couches et d'ajouts hétéroclites, à une véritable gangue lourde et chaleureuse, qui, de facto, devient berceau où vont se lover ses étranges allochtones. 

          Aucun élément de décor. Aucune rupture. Il semble que la main vienne d’elle-même vers le centre de la toile ; fouisse ces non-formes préalables ; compose à petites touches incertaines une silhouette allusive, tantôt verticale, tantôt à chercher en toutes orientations ! Toujours dotée d’une tête aux éléments "vitaux" rudimentaires : yeux minuscules, bouche incertaine ; parfois une amorce de corps, voire un corps à discerner dans le magma, les pieds petits émergeant de la masse colorée. 

         C’est tout… De sorte qu’à la fin (encore que le mot ne convienne guère pour ces êtres inachevés), l’œuvre semble un écrin hermétiquement clos où les personnages sont enchâssés dans la peinture. Tout cela créé non pas, comme il est habituel, par l’expression, mais au contraire par la non-expression. 

Faut-il voir dans cet empêchement de créer des "personnages" dans leur entièreté et dans une logique géographique, voir sociologique, les conséquences de l'exil de l'artiste ? Eloignement de ses racines, de sa civilisation originelle qui le ferait se sentir lui-même en pièces et morceaux ? Et dans ce cas, ces êtres seraient-ils autant d'autoportraits ? Qui sait ?

Jeanine RIVAIS

TEXTE ECRIT SUITE AU BIZ'ART FESTIVAL 2016 DE HAN-SUR-LESSE EN BELGIQUE.