LORANSSE, Récupératrice
*****
Comme tous les Récupérateurs, Loransse crée des œuvres qui sont le reflet de notre société actuelle, une société de surconsommation et de gaspillage. Mais contrairement à nombre d'entre eux qui glanent des objets bien précis (cailloux ; coquillages, os, etc.), il semble qu'elle soit poly-récupératrice (!!!), à savoir qu'elle collectionne aussi bien des outils, que des éléments en bois, en cuir, en laine ou en poil… Même des jeux de société !
Et elle a l'art de les faire cohabiter sans hiatus pour créer ici un humain grandeur nature ; ailleurs un humain encore, apparemment sans tête, mais dont un masque appuyé sur sa pèlerine de cuir, génère un aspect vivant inattendu ; tandis que le corps est réduit à une sorte de boîte se déplaçant sur roulettes ! L'homme robotisé, ou confronté à son handicap, en somme !
Dans le même temps, elle se préoccupe du monde animalier. Et avec le même amalgame de matériaux, crée un dromadaire au corps ratatiné, réduit à la largeur de sa bosse, mais recouvert de tissu, dentelle et bande poilue. Et dont les pattes arrières de papier encollé sont si grêles qu'elles font penser à des pattes de sauterelle ; tandis que celles de devant sont inexistantes ou tellement réduites que la pauvre bête semble dans l'incapacité totale de se relever ! Pourtant elle dresse fièrement la tête, comme pour affirmer que, malgré la muselière elle est capable de mordre !
Finalement, il semble bien que l'univers fictionnel de Loransse soit assez terrible. Mais si, comme il apparaît, ce sont bien ses tracas quotidiens qu'elle jette sur la toile, nul doute qu'au bout du compte, ses créations lui permettent de s'évader, oublier pour un temps, ses révoltes et peut-être, son mal de vivre.
Jeanine Rivais