LUCAS JACQUES

Texte de JEANINE RIVAIS

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          « Jacques Lucas est l’auteur de « La Maison sculptée » sise à une trentaine de km de Rennes. Des problèmes économiques ont fait que, pendant un temps, il a dû se séparer de ce lieu auquel il avait, pendant des années, consacré la majeure partie de sa créativité. Finalement, il a pu la racheter et en faire un lieu associatif voué à des expositions de créations hors-les-normes, ainsi que de son propre travail. 

           Au début de son aventure picturale et sculpturale, il a reçu les encouragements de Robert Tatin, »* lui-même en pleine création de sa Frênouse. Il semble d’ailleurs, au vu des photographies, que la conception de la Maison Sculptée se rapproche par ses entrecroisements d’arcatures décorées, ses proches ombreux, l’abondance de sa statuaire… de l’esprit de l’Etrange Musée de Robert Tatin"*

           Dans le même temps (et sans doute les deux démarches sont-elles solidement interdépendantes), Jacques Lucas est peintre. Il insère sur des planchettes longues et étroites, géométriquement situées côte à côte, des êtres totalement nus,  femmes aux hanches épanouies et aux seins plantureux, hommes musclés aux sexes avantageux. Tout serait donc pour le mieux du fait de cet érotisme latent, prometteur de complicités et de plaisirs… N’était que, jamais, ces possibles protagonistes ne sont dans le même lieu ! Qu’en des clos similaires, se trouvent des sortes d’humanoïdes inquiétants, sans que pourtant, rien ne laisse deviner qu’ils puissent menacer les « humains ».  Mais leurs visages mafflus placés sous des angles inattendus, leurs corps déjetés, incomplets, leur position à cheval sur d'effrayantes roues crantées, font prendre au spectateur,  conscience qu’il s’agit bien là d’étranges allochtones… Et puis, les cheveux drus et frisés des uns et des autres se dressent au-dessus de leurs têtes, happés par quelque mystérieux mécanisme situé en off, comme si l’auteur de cette anomalie suggérait qu’une force inconnue tente de les arracher à la terre… Mais quelle terre ? Des enchevêtrements filiformes, parfois réguliers comme des résilles, d’autres fois serpentant comme des racines aériennes, cernent ces individus, faisant de ces lieux étroits autant de huis-clos, et donnant l’impression que tout n’est peut-être pas idyllique dans le monde de Jacques Lucas. 

*Notes explicatives de l’artiste.

 

CE TEXTE A ETE ECRIT APRES L'EXPOSITION "LE PRINTEMPS DES SINGULIERS" EN 2003, à l'ESPACE SAINT-MARTIN, 199 BIS RUE SAINT-MARTIN 75003 PARIS.