LES ABSTRACTIONS GEOMETRIQUES D'ISABELLE TAHON 

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          Les œuvres d'Isabelle Tahon sont conçues en des bruns lumineux obtenus peut-être par des mixtures de vernis, d'encres, de goudrons et de brous de noix sur des fonds bleu pâle ou noirs ; générant tour à tour des plages de brillants et de mats. 

Selon les œuvres, le motif est triangulaire, rond, torsadé, gondolé, sinueux… Avec des lignes de fuite, des juxtapositions, des répétitions.

 

          Il semble qu’il y ait deux formulations dans les œuvres de cette artiste : celles où l’on voit franchement les reliefs ; et celles presque en trompe-l’œil, où le visiteur doit se placer à trois mètres : il se demande alors s’ils sont plats avec des reliefs peints, ou s’ils sont vraiment en reliefs ? Auquel cas, ces derniers sont plus ou moins importants, plus ou moins sensibles. Et ce travail s’anime beaucoup avec la lumière. 

 

          Quant aux passages peints, ils sont composés de lignes un peu aléatoires mais qui se veulent harmonieuses dans la succession des couches. A chaque fois, un signe se superpose à elles : enchaînement de minuscules boules, arc de cercle bicolore, sorte de boomerang clair et ombré, etc. Et puis, ces lignes se retrouvent tantôt sur des supports quadrangulaires, tantôt carrément dans des cercles ou portions de cercles. Cette alternance de rondeurs et de lignes géométriques, pouvant sembler contradictoire. Mais il semble bien que dans ce monde abstrait, les composants ne vivent que s’il y a des contradictions internes. (Le poli, par exemple, n’existe que s’il y a la référence du rugueux). Et les deux extrêmes sont toujours nécessaires pour que l'œuvre prenne vie. 

 

          Par ailleurs, Isabelle Tahon travaille parfois horizontalement. Mais d'autres fois, la verticalité est plus évidente ; alternant selon les oeuvres des rythmes horizontaux, ou des dominantes verticales comme si la sculptrice ayant trouvé des matériaux couchés cherchait à les remettre dans le sens de la vie. Ou encore à retrouver la verticalité initiale de ces morceaux de bois qui étaient naguère des arbres dressés. Les choses semblant s’enchaîner toujours à partir de ce qu'elle a fait précédemment. Générant ainsi un équilibre qu'elle possédait intuitivement depuis l’origine, né du déséquilibre entre ses composantes géométriques et ses compositions peintes.

 

          Ainsi, Isabelle Tahon  en est-elle venue à une création très contrastée, liée à une éthique rigoureuse. Mais, bien sûr, toutes deux ne pouvaient prendre pleinement leur sens que véhiculées par une démarche sculpturale puissante, une implication profonde dans la peinture, une attitude d’interrogation perpétuelle en quête de soi-même : toutes qualités qu’elle a acquises au fil des ans.

Jeanine RIVAIS

 

TEXTE ECRIT SUITE AU XXXe FESTIVAL "BANN'ART, ART SINGULIER ART D'AUJOURD'HUI"  DE BANNE 2017.