LES PAYSAGES FLOUS D'OSWALD OLIVATO

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          "Pendant des siècles, la peinture a ignoré le flou, cette opacité du visible, pour restituer une vision nette proche de celle du divin. Les premiers ont été les Italiens de la Renaissance à explorer le flou notamment dans le "sfumato" de la perspective aérienne. "Le flou caractérise la vie bien plus que le net, qui fige la réalité dans une représentation avec tous les plans nets, telle une nature morte, comme son nom l’indique". Julia ELCHINGER : Un "éloge du flou…"

 

     Est-ce par goût d'une peinture romantique qu'Oswald Olivato donne à toutes ses créations une connotation floue ? Ou  au contraire pour les rendre paradoxalement plus réelles, plus proches du visiteur, qu'il tente d'enlever au maximum ce qui constitue généralement le propre d'une peinture ? Car, si, dans le détail, la vue semble indistincte, elle est parfaitement claire dans son ensemble. De sorte que paysage vide, vieillard assis le visage caché par son abondante chevelure, ou nageur s'élançant pour plonger dans l'eau… apparaissent immédiatement en tant qu'ensemble, aux yeux du visiteur.

 

          Ou bien s'agit-il, pour Oswald Olivato, de travailler au contraire dans la retenue : intérioriser sa vision, en conservant un découpage précis de scènes aux compositions évidentes ? Ces postulats mis en place, l'artiste a, comme un voyageur resserrerait le champ de vision d'une lunette, placé bien au centre du tableau, un unique personnage statique, "en attente". L'artiste a concentré sur lui une profusion de traits, griffures, replis, petits coups de pinceaux presque secs pour obliger l'enduit préalable à renvoyer la couleur, jouer des quadrillages de la toile à gros grain marouflée sur un support dur. Le tout s'appuyant sur des variantes de fonds gris bleutés qui rappellent les contrastes des soirs d'été ; et de violines foncées ou au contraire très pâles confortant la "présence" des personnages réalisés avec de fines lignes claires génératrices de clairs obscurs, flous comme les jeux de lumières aux petites heures du jour ou d'un contraste cru obligeant à ciller des paupières le spectateur étonné.

 

          Dans son film "La Voce de la Luna", Pasolini posait naguère en filigrane la question "qu'avons nous fait de la lumière ?" Insensiblement, Oswald Olivato réalise la coalescence des deux lumières ; peint de ses personnages des instantanés bouleversants par leur austérité ; préserve l'illusoire certitude que les êtres enfermés dans ces huis clos sauront trouver une issue.

                                           Jeanine RIVAIS

 

TEXTE ECRIT SUITE AU XXXe FESTIVAL "BANN'ART, ART SINGULIER ART D'AUJOURD'HUI"  DE BANNE 2017.