PERIPLE CREUSOIS 2020 

 

MONUMENT AUX MORTS PACIFISTE

et 

JEAN CACAUD

(1827-1900)

ET SES STELES DANS LE CIMETIERE DE GENTIOUX

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LE MONUMENT AUX MORTS DES PACIFISTES

 

 

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          Nous parvenons à Gentioux village perché sur le plateau de Millevaches sous une pluie battante et par un brouillard qui limite considérablement la visibilité. Malgré cela, avant d'aller visiter les stèles de Jean Cacaud, nous faisons un arrêt au si particulier Monument aux Morts érigé sur la place. Ce monument n'a rien à voir avec l'Art brut, mais c'est un bel exemple d'Art populaire, et à ce titre, il nous intéresse. 

Le monument aux morts et détail.
Le monument aux morts et détail.

          Sur le monument, érigé en 1922 pour dénoncer les horreurs de la guerre de 14-18, est inscrite la maxime : "Maudite soit la guerre". C'est le rendez-vous des pacifistes qui souhaitent, à chaque 11 novembre, dénoncer l'absurdité de la guerre. A côté du monument, se tient un jeune garçon réalisé en bronze, vêtu d'une blouse et chaussé de sabots de bois. Il tient dans sa main gauche son béret. Il tend son poing droit fermé vers la maxime, comme pour s'assurer qu'aucun visiteur ne passera sans la voir.  

          L'histoire locale résume celle de ce monument atypique : "Le monument de Gentioux est, par sa sobriété, particulièrement explicite", considère Régis Parayre, "qui anime la fédération creusoise de la Libre pensée à l'origine de la manifestation pacifiste.

          Ce monument atypique n'a jamais été inauguré officiellement en raison de l'inscription stigmatisant la guerre. Un préfet de la Creuse avait en 1989 proposé de l'inaugurer mais exigeait que la phrase soit recouverte d'une plaque : "Gloire aux enfants de Gentioux morts pour la France". Ce que le conseil municipal refusa. La petite histoire raconte également que les soldats du camp militaire voisin de La Courtine avaient ordre de détourner la tête lorsqu'ils passaient devant le monument. L'enfant aux sabots de Gentioux est cependant inscrit depuis 1989 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques au titre des lieux de mémoire. Il reste pour la Creuse un symbole fort de ce que fut la Première guerre mondiale: avec 11.000 morts pour 56.000 mobilisés, le département a payé un lourd tribut.

          "La commune est fière de ce monument mais les deux manifestations sont distinctes. Une est de l'ordre du souvenir, l'autre du militantisme", explique Pierre Simon, maire de Gentioux-Pigerolles (395 habitants), qui n'assistera pas à la manifestation pacifiste.

          Toutefois, après des incidents dans les années 90, il n'y a désormais plus aucune tension entre les différents publics. "C'est vrai, il y a eu des épisodes difficiles", se souvient le maire, "les habitants estimaient qu'il y avait un manque de respect pour leurs morts".

          Après la commémoration, les pacifistes devaient se rendre au cimetière de Gentioux, pour fleurir la tombe de Félix Baudy, fusillé pour l'exemple en 1915. Pour M. Parayre, c'est "une façon d'appeler à la réhabilitation de tous les fusillés pour l'exemple, ceux qui refusaient de participer à la grande boucherie".

          Nous sommes très étonnés par ce monument, et nous aussi, nous partons pour le cimetière et les stèles de Jean Cacaud.

 

Le texte ci-dessus a été repris d'un article de La Dépêche du 11 novembre 2010

 

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JEAN CACAUD

(1827-1900)

ET SES STELES DANS LE CIMETIERE DE GENTIOUX

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          Est-il vrai, comme le veut la petite histoire locale, que Jean Cacaud vivait en ermite dans une modeste cabane construite au flanc du mont de la Brauze, et dont le vestige serait encore visible ? Impossible de le vérifier, bien sûr, mais ce que légende veut…

          Ce qui est à peu près certain, c'est que, même s'il s'affirmai artiste, il était de son état tailleur de pierre, et que divers monuments réalisés par lui existent ailleurs dans le cimetière, et dans les environs.

          Mais sa pièce maîtresse est cet ensemble de cinq sépultures réalisées près de l'entrée du cimetière de Gentioux. L'ensemble était dédié à sa famille : 

L'ensemble des 5 stèles de Jean Cacaud
L'ensemble des 5 stèles de Jean Cacaud

 "L'ensemble de la sépulture (¹) se présente sous la forme d'une tombe rectangulaire où sont dressés, sur deux de ses côtés, cinq stèles ornées de sculptures et terminées par un fronton. La stèle centrale, à l'arrière du tombeau, était probablement dédiée à la soeur de Jean Cacaud, qui était couturière. La stèle la plus à droite et à l'arrière du tombeau est formée d'une dalle flanquée de deux colonnettes supportant un fronton sculpté de denticules. La plus ornée des stèles est celle située en arrière du tombeau, à gauche. Le montant médian portait un petit personnage encapuchonné, agenouillé sur un morceau de fût au décor de feuilles imbriquées, et posé sur un masque humain qui subsiste. De part et d'autre se dressent deux piliers cannelés supportant un entablement en saillie sur lequel est placé un fronton triangulaire ajouré d'un trilobe sous lequel s'inscrit une tête barbue soutenue par deux chiens. Les rampants sont garnis de statuettes. Au sommet, une croix pattée se dresse sur un fût de part et d'autre duquel se tiennent debout un homme et une femme portant un grand voile tombant".

 

La première stèle de gauche est la sienne, où il repose depuis lors. Et qui le représente avec quelques bons amis, occupé à tailler dans le granit, un enfant, avec sa mère, arrivant dans un ciel entourés d'anges... 

La stèle de Jean Cacaud vue sous tous les angles. En bas du socle où on le voit sculptant était gravé "FAMILLE CAUCAUD", inscription aujourd'hui disparue à cause de l'usure.
La stèle de Jean Cacaud vue sous tous les angles. En bas du socle où on le voit sculptant était gravé "FAMILLE CAUCAUD", inscription aujourd'hui disparue à cause de l'usure.

 

(²) Dans cet extrait tiré de la "Revue des maçons de la Creuse", il s'agit d'une autre stèle (celle de la famille Canque) qui serait, elle aussi, l'oeuvre de Jean Cacaud :

"La partie sommitale de la stèle n'était pas pourvue d'une croix mais d'une stèle qui était sans doute le portrait d'Etienne Canque. Celle-ci a donc été brisée (a-t-elle disparu ou bien a-t-elle été conservée ?) entre aujourd'hui et 1978, date à laquelle ont été réalisées les photos de l'inventaire.

Dernier point intéressant : ce tombeau, comme plusieurs autres du cimetière de Gentioux, est l'œuvre d'un sculpteur local, Jean Cacaud. Probablement simple tailleur de pierre à l'origine, il est décédé en 1900 à Gentioux après avoir vécu longtemps en ermite dans une cabane troglodyte. Son propre tombeau est un chef-d'œuvre d'art naïf. On le voit occupé à tailler la pierre dans sa jeunesse. Était-il un Compagnon Étranger tailleur de pierre ? Cela n'aurait rien d'impossible..."

(¹) Ce descriptif est repris du texte Internet intitulé : Monument funéraire de la famille Cacaud à Gentioux-Pigerolles.

(²)Cette note et l'image sont extraites de la revue "Les maçons de la Creuse".

 

Les photos sont de Michel Smolec, malgré le temps encore plus gris que la veille.