Jeanine Rivais : Thierry Lambert, parlez-nous de ce travail très découpé, très coloré, détachant des sortes de petits personnages ciselés…

          Thierry Lambert : Ils sont plus ou moins d'inspiration indienne…

 

          J.R. : Pourquoi vous surnommez-vous "L'Indien blanc" ? Quelle est votre relation à la civilisation indienne ? 

          T. L. : Cela fait partie de moi. J'aime les gens qui tiennent leur promesse et la gardent.

 

       J.R. : Excusez-moi ; mais je ne comprends pas en quoi la culture indienne a, plus que d'autres, tenu ses promesses ? Vous parlez des Indiens d'Amérique ? 

         T. L. : Oui. Les Indiens d'Amérique du Nord, Sioux, Arapahos… Parce qu'il s'agit encore de l'originel…

 

        J.R. : Comment définissez-vous ces petites œuvres ? 

        T. L. : Des esprits. Des esprits bénéfiques ! 

 

          J.R. : Bénéfiques, pour qui ? Pour le spectateur, ou pour vous ? 

          T. L. : Pour le spectateur. Dans mon esprit, c'est ainsi que je les conçois.

 Moi, je n'en ai pas besoin, puisque je les donne à recevoir par les autres. J'essaie de donner de la chaleur humaine. 

 

       J.R. : Plusieurs, tout de même, ressemblent à des scorpions, serpents, etc. Quelle est leur relation aux autres ? 

          T. L. : Il s'agit-là de tout ce qui est occulte, ce qui est caché et qui essaie de ressortir petit à petit. 

 

          J.R. : Est-ce pour cette raison qu'ils sont plus colorés que les autres ? D'un rouge ou d'un jaune éclatant ? 

          T. L. : Tous sont colorés. Mais ceux-là partent davantage vers la lumière.

 

          J.R. : Si je lis, parmi les titres qui les accompagnent, "Le Monde des Abysses", dans votre esprit comment reliez-vous l'idée des grandes profondeurs, avec la culture indienne? 

          T. L. : Là, c'est déjà passé. Je suis passé de la culture indienne pure, c'est-à-dire le Katchina (¹) à autre chose, parce que je m'inspire de tous les primitivismes qui se rejoignent en un même pôle, une même "religion" de l'univers. Et cela a été bafoué, cassé au cours des âges par rapport à la Tour de Babel. Mais, à l'origine, toutes les premières croyances étaient d'une seule veine, puisque la terre était d'une même Genèse.

 

(¹) Katchina : n.m. Mot indien. Chez les Indiens d'Amérique du Nord, être surnaturel, intermédiaire entre les dieux et les hommes ; masque qui le représente. 

 

ENTRETIEN REALISE EN 1998, LE JOUR DE L'INAUGURATION DU MUSEE DE L'ART EN MARCHE.

ET PUBLIE DANS LE N° 62 D'AVRIL 1998 DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA