VOYAGE AU CENTRE DE LA CORSE

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La Balagne
La Balagne

          J'aime les villes. Je n'ai aucun a priori contre le béton, si je trouve en son centre des théâtres, des cinémas, des musées, des galeries d'art, et des amis.

          Il y a quatre ans, quand j'ai atterri pour la première fois dans l'île que tous les guides touristiques et les chansons populaires appellent l'" Ile de Beauté ", j'y suis arrivée en simple touriste. Toutefois, comme je déteste " bronzer bête ", j'avais prévu un planning impressionnant de visites de villes, citadelles, églises classées, etc. Tout un programme touristico-culturel.

          A peine sortie de l'aéroport, La Balagne, les Agriates, le maquis m'ont convaincue que je faisais fausse route : Pourquoi cette mer est-elle si bleue qu'elle semble sortie d'une carte postale ? Pourquoi les routes de montagne dont les habitants disent qu'elles ont été tracées pour les ânes, sont-elles si tortueuses ? Pourquoi le maquis sent-il si fort au soleil ?

 

Les Agriates
Les Agriates

          Alors, avec un esprit et une curiosité exacerbés, je suis partie à la rencontre des lieux et des gens qui les ont créés. J'ai appris à les aimer, à respecter leurs différences. Pendant un temps, j'ai été frappée d'" insularité ".

          … Mais, peu à peu, la chaleur m'a empêchée de dormir, les cigales ont craqueté trop fort, le libeccio a soufflé trop souvent, et j'ai commencé à chercher mon environnement habituel : les théâtres ? (Bastia, Ajaccio, bah !) Les cinémas (Stallone et Schwarzenegger !) ; les musées ? J'ai longuement erré parmi les merveilleuses statues préhistoriques de Filitosa, les foules d'Aléria, rêvé quelques heures au milieu des roches collections léguées par Monseigneur Fesch à la ville d'Ajaccio, passé un petit moment dans le minuscule Musée des Arts et Traditions populaires de Bastia, visité à toute allure quelques expositions temporaires d'amateurs en mal de notoriété. Et puis, plus rien ! Ah si ! Un FRAC à Corte.

          Frustrée, redevenue touriste par force, je suis partie à la recherche des artistes, des vrais, des vivants, car il était impossible que, dans cette île, les artistes n'existent pas ! Maintes fois, j'ai posé la question inquiète : " Existe-t-il un art en Corse ? ", ou naïve : " Existe-t-il un art corse ? "

          Plusieurs milliers de kilomètres plus loin, par des routes impossibles, après des rendez-vous dont la convivialité m'a convaincue que la chaleur de l'accueil, là-bas, est plus forte que les bombes et les incendies, j'ai appris qu'il y a un art en Corse, et des artistes ! J'ai découvert combien les passions y sont violentes pour créer, défendre, ou avoir accès à cet art !

          Et si, comme je le crois, j'ai su tisser quelques liens d'amitié sincère, alors ce petit texte est un hommage à mes nouveaux amis !

Jeanine RIVAIS