HOTEL DE VILLE  DE SAINT-ETIENNE  

 

JEAN-FRANCOIS RIEUX, peintures 

 

          "Quatre couleurs : Du rouge, de l’orange, du jaune et du bleu. Des têtes (incontournables) en légers reliefs, tirées de glanes du quotidien. Offrant au premier regard l'impression d'être toutes similaires, mais contredisant ensuite cette impression pour devenir bouilles joufflues,  visages étiques, rieurs, sinistres… de face souvent, de profil parfois ! Et toujours, de grands yeux qui semblent provoquer le visiteur".J.R. 

VOIR AUSSI : TEXTE DE JEANINE RIVAIS "SOUFFRANCE ET DESENCHANTEMENT de JEAN-FRANCOIS RIEUX". : N° 71 DE JANVIER 2002 DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA.

Et http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS RETOUR SUR PRAZ-SYR-ARLY 2001

Et aussi Site : http://jeaninerivais.fr Rubrique ART SINGULIER. 

Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003.

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AMICALE LAÏQUE CHAPELON

 

 

ALAIN KIEFFER,

sculptures

          "Grandes, ou au contraire toutes petites à presque tenir dans la main, mélange doux de terres brunes et blanches,  les sculptures d'Alain Kieffer évoluent de l'ironie à l'humour et à la tendresse la plus intime. S’inspirant de photos anciennes, de visites en des lieux souvent hors-normes, il chamboule le tout pour donner de prime abord au visiteur une impression de proximité ; mais l'amener petit à petit à se poser la question double  : Ai-je bien senti son "dit" ? Ou en suis-je à des années-lumière ?" J.R.

VOIR AUSSI : 

KIEFFER ALAIN : ENTRETIEN "CERAMIQUES INSOLITES", http://jeaninerivais.fr Rubrique Comptes-rendus de Festivals SAINT-GALMIER 2006, 

et Texte de Jeanine Rivais : "LE MONDE ENTRE DEUX ZOOS D'ALAIN KIEFFER, SCULPTEUR". " : http://jeaninerivais.fr Rubrique ART SINGULIER. 

Et ENTRETIEN  AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS. RETOUR SUR  BANNE 2003.

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GALERIE CENTRE SOCIAL DU BABET 

 

 CHRISTINE FAYON sculptures textiles

          "Amalgame de soies, dentelles, galons, boutons, infinité de petits objets glanés ici et là ; mêlés, collés, agglutinés… pour reconstituer des bribes de vie, de voyages, de joies et de peines. Le tout chatoyant, luxuriant, couvert de façon aléatoire d'écritures ou de bribes de photos-souvenirs : tendre et intime." J.R.

VOIR AUSSI : 

ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.doc/  Rubrique FESTIVALS : APACOP MARSAC 2012.

SABINE FELICIANO, sculptures textiles

          "Quels sombres "dedans" ! Car, bien que toutes de couleurs tendres, les sculptures de Sabine Feliciano étalent sur les cimaises, souris écorchées, lapins, corbeaux, serpents… étripés ; flamants roses pattes en l'air, offrant leurs tripes au regard du spectateur, à la fois amusé de tant d'audace et de provocation,  et perplexe de n'avoir jamais la certitude de détenir la bonne clef ; même si, progressivement, ce visiteur prend conscience de la profondeur des interrogations de l'artiste ; de sa difficulté à trouver un équilibre dans le monde et de s’y installer ; de l’âpreté avec laquelle, comme tant d’autres créateurs d’Art-Récup’, elle fouit les objets communs, vulgaires ou banals pour en tirer la quintessence, découvrir, comprendre comment ils ont été pour d’autres et les mêler à ses jolis galons, rubans, fils, etc." J.R.

 

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LES SEPT COLLINES  

 

CEDRIC GROSSEMY

          "A  regarder de loin, le visiteur ne voit que quelques taches en noir et blanc ou en couleurs sur papier blanc. Aussi, la surprise vient-elle lorsqu'il s'approche ! car soudain, ces petites taches prennent vie, deviennent microcosmes représentant des têtes tournées tous azimuts et souvent confondues avec le mini-décor ! Tantôt rieuses, tantôt tristes, voire ricanantes, provocatrices… D'autres fois, ce sont des animaux fantasmagoriques, des quartiers de villages aux huttes primitives, des parcs publics avec vasques. Les plus impressionnants étant les noirs et blancs à cause des milliers de micro-points rappelant la concentration obsessionnelle des premiers artistes d'art brut dénichés derrière les murs des huis clos asilaires !" J.R.

LEON

          Léon serait-il tombé à court de boîtes à œufs et autres mousses que, désormais, ses saynètes se retrouvent à peine en relief ? Pour autant, ses têtes supportées par des amorces de bustes, agglomérées en amas grégaires, demeurent raboteuses, taillées "à coup de serpe". Braquant à l’horizon leurs yeux exorbités ! Leurs bouches béant à qui mieux mieux ! Partout furetant, si audacieuses, si intrépides, voire tellement subversives que, bien qu'échappées à leurs boîtes originelles, elles semblent paradoxalement incapables de profiter de leur liberté pour s'égailler dans la nature ! 

          Coloriste jusqu’au bout du pinceau, osant les teintes les plus vives, les contrastes les plus péremptoires, le peintre continue de mignoter ses œuvres : chaque bonnet est surbrodé, chaque maillot longuement cousu, liseré, boutonné ; chaque réticule surpiqué à l’envi ; le costume du torero brille de tous ses faux diamants et le taureau est richement empoilé … Et subsiste incontestablement le dynamisme des œuvres ; l'agrément des couleurs ; l'humour et le sourire qui se conjuguent en complète harmonie, pour faire du monde de Léon de grands moments de plaisir ! J.R.

VOIR AUSSI : 

MELTON JEAN-CLAUDE, dit LEON : TEXTE DE JEANINE RIVAIS : " LE MONDE COLORE DE LEON" : http://jeaninerivais.jimdo.doc/   Rubrique RETOUR SUR UN QUART DE SIECLE D'ECRITURE.

Et : http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS. RETOUR SUR  BANNE 2003

Et ENTRETIEN  AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.doc/   Rubrique RETOUR SUR UN QUART DE SIECLE D'ECRITURE.

NADIA NIETO

          Est-ce la clef de sol dotée d'un œil qui donne le ton de l'œuvre de Nadia Nieto ? Il semble bien, en tout cas, pour faire un mauvais jeu de mots, que son itinéraire fantasmagorique soit un brin décousu ! Et pourtant, que d'étapes, que de rencontres, si chaque mini-photographie intimement liée à celle contiguë en est bien une ! Car, le visiteur, le nez collé sur le tableau, pour en percevoir chaque détail, s'y trouve face à un banquet, une fleur, une fillette pensive, une autre souriante… un groupe, des lettres, des notes, et au beau milieu de ce méli-mélo de petits moments intimes, une phrase : HYMNE OFFICIEL DES DROITS DE L'ENFANT. Le tout, et c'est là le paradoxe, soigneusement cousu –brodé même- ensemble, comme si le monde entier était là réuni pour donner enfin un cadre harmonieux à l'enfance trop souvent mise à mal ! J.R.

 

MARCEL SEVE

          Les compositions de Marcel Sève sont disposées en aplats géométriques ; chaque forme monochrome est conçue en des variantes de bleus qui font ressortir les additifs jaunes ou orangés pouvant virer au rouge et rose violine. Toujours paradoxalement vives et  mates, ces constructions jouent avec la lumière.  

Ces reliefs peints proposent des éléments juxtaposés ou se recouvrant partiellement. Le motif, selon les œuvres, est triangulaire, trapézoïdal, en équerre… alternant des rythmes horizontaux, ou des dominantes verticales. Générant ainsi un équilibre rigoureux. J.R.

MICHEL SMOLEC

          Les petits couples de Michel Smolec apparaissent richement vêtus de costumes deux pièces et bottines à boutons pour les hommes ; bottes montantes, jupes sophistiquées et justaucorps pour les femmes dont les seins, pourtant, continuent coquinement de provoquer l'œil. Des "approches", des "attentes", qui font sourire le spectateur, d’autant que les titres corroborent cette notion d’espérance et de complicité : "Premiers émois ; "Qu'en penses-tu?"… ; et que l’artiste sait, avec talent, en multiplier les "hypothèses" qui, elles-mêmes, multiplient les joutes en suspens…  

          Tout son petit monde peint  donne également une grande impression de mouvement, paradoxal dans ces espaces restreints, où "vivent" des êtres libertins plutôt qu'érotiques,  audacieux mais jamais licencieux ; où ses femmes se dénudent,  sont plantureuses, belles toujours et où les hommes sont plus "discrets", mais prêts à les accompagner dans leurs initiatives ! 

           Et c’est ainsi, sculptures ou peintures, qu'il pousse en un patchwork de couleurs lumineuses et tendres, les pions de ses petits théâtres de la vie ; de ses histoires intemporelles ; de ses “écrits” picturaux qui sont, chaque fois, de grands moments d’émotion jugulée.J.R.

VOIR AUSSI : 

SMOLEC MICHEL : TEXTES DE JEANINE RIVAIS : "NAISSANCE D'UNE VOCATION" DANS LE NUMERO 58 DE SEPTEMBRE 1996, DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA. "DE TERRE ET DE CHAIR, LES CREATIONS DE MICHEL SMOLEC, sculpteur" 

et :  "TANT ET TROP D'YEUX ou MICHEL SMOLEC dessinateur" : http://jeaninerivais.fr Rubrique ART SINGULIER.

 Et aussi : "ET DE NOUVEAU NOUS SOMMES DEUX" : http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique ART SINGULIER. 

Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003

JACQUELINE WINTZER PLANTE

          Est-ce parce qu'elle les fixe sur du carton qui qui est apparemment son matériau de prédilection que les oriflammes de Jacqueline Wintzer Planté semblent à fois raides et souples, tous suspendus par un fragment de branche intouché ? Raides parce que le "corps" peut représenter carrément un masque, ou des visages dont les traits seraient brodés, maillés ou collés sur un tissu ; ou encore des compositions allant de la fleur à de minuscules rectangles ou cercles répétitifs. Chaque fois, conçus ton sur ton de bruns, de bleus ou de rouges ocrés. Souples, parce que l'artiste rallonge, ou élargit cette première partie par des bouquets de fils, des fanfreluches perlées… Le tout composé avec un grand sens de l'harmonie des formes et des teintes. J.R.

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CENTRE SOCIAL ET NOUVEAU THEATRE DE BEAULIEU 

 

BERNARD LE NEN

Malade, Bernard Le Nen n'est arrivé qu'après mon passage ! 

VOIR AUSSI : TEXTE DE JEANINE RIVAIS : " LES GENEALOGIES FANTASMAGORIQUES DE BERNARD LE NEN" : BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA N° 72 Tome 1 de février 2003. 

Et Rubrique ART ET DECHIRURE. http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique ART SINGULIER.

VOIR AUSSI : "CINQ QUESTIONS A…" : BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA N° 75 Tome 1 d'AVRIL 2004. 

Et http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS : RETOUR SUR PRAZ-SUR-ARLY 2003.

IGOR KONAC

Citadines ou rurales, les oeuvres d'Igor Konac

          Chagall aurait-il été sensible aux créations de son compatriote Igor Konac ? En tout cas, la filiation est évidente ! Tous deux ont été ou sont friandes de petites histoires humoristiques chargées de poésie, en un choix de couleurs allant des bruns aux bleus. 

          Même goût pour les scènes citadines où l'amoureux offre des fleurs à sa bien-aimée, tous deux plus grands que les maisons, sous l'œil vigilant d'un minuscule chien ! tandis qu'un autre semble terriblement s'ennuyer, assis sur une banquette, face à la ville qui dort. Où encore, comme chez les enfants où il manque un mur à un immeuble, de sorte que le passant peut voir tout ce qui se passe dans les appartements…

               Et puis, chez l'un et autre, même goût récurrent pour les scènes rurales où un trio assis dans un champ à l'orée du village, joue de la musique sous la lune dorée ! Où un pianiste (les musiciens sont légion dans les œuvres d'Igor Konac) attablé devant son litron, rêve de danseuses de french Cancan ! Où un couple se promène sur une balançoire, parcourant le ciel azur au-dessus des maisons, sous la lune, blanche cette fois !! Etc.

          Alors, qu'est-ce qui différencie Konac-le-contemporain de Chagall-l'ancien ? La pureté, la vivacité  des couleurs du premier, alors que celles de Chagall étaient souvent légèrement estompées. L'ironie parfois féroce chez Konac, comme cette scène d'enterrement où les badauds sont aux fenêtres attendant le corbillard, tandis que les croque-morts en queue-de-pie se prélassent, blasés,  devant l'entreprise des Pompes funèbres ! Les images du rêve -qui, chez l'un et l'autre  construisent un monde qui n’est ni une fiction, ni une imitation du monde réel-, qui semblent plus détachées chez Konac, comme s'il se voulait observateur de son monde, et non pas s'y intégrer ! De même, la symbolique,  souvent évidente chez Chagall où les personnages pouvaient revêtir de multiples significations (une madone pouvait aussi être une mariée…) a disparu chez Konac, où un musicien est un musicien, un amoureux est un amoureux, etc.

          Bref, Konac a renoncé à l'allégorie et au narratif propres au XXe siècle et est entré de plain-pied dans son monde bien à lui ; a certes revisité certains thèmes anciens, mais à chaque fois, il les a enrichis de contemporanéité et  d’une dimension personnelle  : ce que l'on appelle en général la créativité et le talent.

Jeanine RIVAIS

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

CHRISTIAN MALCOURT

          Salvador Dalì a écrit : "La différence entre les vrais souvenirs et les faux est exactement la même qu’avec les bijoux : ce sont les faux qui ont toujours l’air le plus vrai". Ne peut-on appliquer cette maxime aux créations obsessionnelles lorsqu'elles naissent de l'esprit fantaisiste d'un artiste ?

          Car il faut bien parler d'obsession à propos des voitures de Christian Melcourt. De profil, en plongée, multiples ou solitaires, ce sont encore et toujours des automobiles. Si elles sont drues comme des pâquerettes sur l'autoroute au pied des immeubles de banlieues, elles se ressemblent toutes et rappellent les mignonnes Coccinelles de naguère ! Si elles sont à l'arrêt pour cause d'embouteillage autour de quelque rond-point, elles semblent toutes d'une longueur démesurée, comme ces interminables Limousines qu'arborent les vedettes américaines ! Si elles sont seules, en gros plan sur fond rouge incandescent, elles ont un petit air passéiste de DS, décapotable s'il vous plaît, ou de Peugeot 203 tellement innovante au moment de sa sortie ; voire même de la célébrissime Dodoche qui, contre vents et marées, continue d'enchanter les rencontres des voyageurs ! Et puis,  pourquoi l'artiste a-t-il choisi cette couleur plutôt que telle autre ? Faut-il penser que les mondes qu'il crée le ramènent à des expériences remémorées ?

          Subséquemment, s'agit-il de nostalgie d'une enfance où ces voitures faisaient la fierté ou l'envie d'un petit bonhomme haut comme ça ? D'un goût du rétro, face aux bolides super-luxueux d'aujourd'hui ? Qu'importe, mais en tout cas, voitures toujours ! Identifiables, même par le profane ! J.R.

VERONIQUE STERNBAUM

          Infatigable, Véronique Sternbaum parcourt les forêts savoyardes, hotte au dos et machette à la main. Elle de l'Afrique où elle a vécu d'étranges aventures ou des lointaines Iles sous le vent, elle réalise des "peintures" en relief, représentant souvent des scènes ou des paysages de "là-bas". En même temps, coupée sans doute pour toujours de ces racines exotiques qu'elles s'est forgées au cours de longues années, elle "raconte" les impressions recueillies au fil de ses promenades dans ces environnements… Mêlant réminiscences, culture et réactions naissantes.  Ainsi, la femme allongée au bord du ruisseau, dans la forêt, sous la clarté de la lune, (et il est curieux de constater combien, sans la connaître, cette œuvre est proche de La Bohémienne endormie du Douanier Rousseau) va-t-elle de pair avec la danseuse frappant des pieds dans la poussière. Ainsi, les villageois longeant la piste séculaire côtoient-ils la truie avec ses innombrables petits gorets… Ainsi, paysans battant le mil, studio photos "Le Béni" attendant de tirer le portrait au prochain visiteur, femme en belle robe à fleurs attendant dans les cannes à sucre… gambadent-ils indifféremment dans de hautes futaies exotiques ou des houppiers aux feuillages familiers ! J.R.

VOIR AUSSI : 

 TEXTE DE JEANINE RIVAIS : "Sous influence" : N° 66 de janvier 2000 du BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA. 

ET AUSSI "Sous influence", l'Afrique de Véronique Sternbaum, peintre médiumnique" : Site : http://jeaninerivais.fr Rubrique ART SINGULIER. 

Et aussi  ENTRETIENS : http://jeaninerivais.fr Rubrique COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS. Rubrique BANNE 2006 et NOTTONVILLE 2007. 

Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003

 TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

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ATELIER DE LA BOISEUSE

 

CHRISTIAN KOUYOUMDJAN :

Malgré une très longue attente dans le froid, la galerie ne s'est pas ouverte ! 

 

 

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MJC DES TILLEULS

 

 PHILIPPE RIBAUD

 

          Lorsque Philippe Ribaud met sur la toile des formes aussi différentes, peut-il s'agir de possibilités de coexistence de formes de vie ? Des arcanes doucement colorées, aux toiles “pointillistes ”, jusqu’à l’amorce de peinture “figurative”, chaque tableau semble un creuset débutant dans l’informe ou l’anarchie formelle, sur lesquels l’artiste va progressivement brider sa fantaisie, imposer sa vigueur, plaquer ses structures ! Car chaque œuvre semble partir d'une ambiance quasi-abstraite, évocatrice plutôt que descriptive. 

          Pourtant, sans avoir à forcer son imaginaire, le visiteur voit ici une tête de profil ;  là un entrelacs horizontal symbole de l'infini, avec une tête d'oiseau ; ailleurs un agglomérat de cercles et de points qui pourraient représenter la voûte stellaire, passage qui l’entraîne aux confins de la science-fiction ; aux franges d’une psychanalyse engendrée par des enchevêtrements de formes très humanoïdes ; vers des références picturales, comme ce "paysage" portant un C.couché qui pourrait figurer sur les cimaises d'un peintre tachiste. Un travail de très près, créant maints petits détails fignolés comme une broderie ; avec des nuances, des contrastes, faits d’aplats mats ; dans de belles teintes de bleus allant vers des gris vert-de-grisés ; ajoutant à la peinture apparemment de la colle, des encres, du sable... jusqu'à ce que  l’artiste s’arrête enfin, SON monde en équilibre ! J.R. 

XANDRE SAETTA

          Ce sont de bien complexes alchimies que confie à la toile Xandre Saeta ! Pour commencer, il lui faut créer le magma d'où surgiront, tels des golems, ses créatures.  Elle pose donc, superpose, appose longuement à grandes traînées du pinceau surchargé ou au contraire presque sec, épaisseurs sur épaisseurs de peinture. Parfois, encore humides, elles vont se mêler en flaques informelles ; ailleurs, des nuances de rouges violines vont  faire vibrer quelques noirs jetés ici ou là ; tandis que s’étagent des transparences  qui provoquent des nuances et des granités accidentels… L’artiste en vient, à force de superpositions irrégulières de sous-couches, à une véritable gangue lourde et chaleureuse, qui, de facto, devient berceau où vont se lover ses "personnages" inattendus. Ayant perpétuellement en arrière-plan de son esprit ses obsessions mythologiques, elle s’efforce –littéralement- de leur donner corps.  

          Aucun élément de décor. Aucune rupture. A partir de là, commence pour Xandre Saeta un psychodrame pictural : l’aventure débute par une longue confrontation entre le fond abstrait et la main de la peintre qui suit telle ligne, explore telle craquelure, jusqu’à ce que s’impose à l’évidence, une silhouette qui  emmènera cette main vers un “homme” ou un “animal”. Un homme ou un animal ? Un homme/animal, plutôt. Mais il semble bien qu'il n'arrive sur la toile qu'après une période de gestation, au cours de laquelle l'artiste compose à petites touches blanchâtres, une sorte de liquide amniotique, d'ectoplasme dentelé, informe, translucide ; porteur, peut-être d’atavismes immémoriaux, d’anciennes cultures, de toutes les obsessions qui, depuis son enfance, l’accompagnent ? Peu à peu, un dialogue s’établit, la figure se concrétise comme si l’artiste la peignant enfin  nette, souhaitait donner au spectateur un espace subjectif où il puisse laisser son propre imaginaire suivre ou récuser la forme soulignée par le pinceau. 

          Et c'est là que se produit le miracle : De ces non-formes évoquées, surgit ici un centaure, là un minotaure. Un choix qui n'est pas innocent : car il ramène le visiteur au plus lointain des mythes  : des créatures moitié hommes moitié bêtes. Le premier réputé pour sa noblesse d'âme et ses connaissances en médecine ; le second illustrant le combat éternel de l’homme contre son propre inconscient ; si cruel qu'il fut enfermé dans un labyrinthe dans le dédale duquel l’homme moderne tente de  retrouver son chemin à l’aide d’un  fil d'Ariane, et se libérer.

          Car à l'évidence, c'est la quête de Xandre Saeta : libérer l'homme de son animalité. Sans doute est-ce pour cette raison qu'elle ne parvient jamais à le représenter "seulement" homme : dans la série de portraits qui entourent ses créatures mythologiques, alors que les yeux perçants parfois jusqu'à la folie sont incontestablement humains, nez et bouche sont étroitement liés pour générer un individu doté d'un groin, d'un appendice bovin, voire d'une sorte de bec crochu… 

          C'est donc une véritable quête à laquelle se livre l'artiste qui confirme la fascination des monstres sur les créateurs. Mais depuis longtemps, l 'homme utilise la métaphore de l'animal pour parler de lui sans que cela l'implique directement. Alors, n'est-ce pas ce que fait Xandre Saeta pour parler d'elle-même?

 Jeanine RIVAIS

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

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HOPITAL PRIVE DE LA LOIRE

 

DENIS BONNES : Malade, l'artiste a dû annuler sa participation au dernier moment.

VOIR AUSSI : 

TEXTE DE JEANINE RIVAIS : "IN VINO VERITAS, LES ROBOTS DE DENIS BONNES" : http://jeaninerivais.fr :  Rubrique ART SINGULIER 

Et  TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003.

 Et aussi : ENTRETIEN  : http://jeaninerivais.fr Rubrique COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS NOTTONVILLE 2007.

JEAN-FRANCOIS BOTTOLIER 

          La création de Jean-François Bottolier s’accroche de façon obsessionnelle à l' humain. Des individus jamais linéarisés, toujours gondolés, dont les contours et les possibles drames morphologiques se succèdent en fioritures grises  sur les fonds foncés, carrelés souvent ; rebondissent en rondeurs de seins jaillissant hors des décolletés profonds, disparaissent sous des fraises aux multiples godets ;  retombent des replis ventraux sur les cuisses puissantes ; croulent sous des tubulures vestimentaires si volumineuses qu'il semble que l'artiste n'ait plus pu s'arrêter ! Ou, au contraire, fusent en lignes ténues selon qu’elles délimitent telle partie anatomique ou vestimentaire, intéressant plus ou moins le créateur , tels un nœud papillon,  un string réduit à la portion congrue… Etc.

          Peut-être en fonction de l'humeur de l'artiste, ils ont des têtes animales ou humaines, des bouches démesurées ou minuscules, lippues ou minces ; gaies ou sévères, joyeuses ou furieuses… Nu-pieds ou chaussés de croquenots, ils sont vautrés passivement ou batifolent en groupes à qui mieux mieux. 

VOIR AUSSI : 

 ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.fr Rubrique Comptes-rendus de festivals Banne 2008.

JACKY CHEVASSON

         Jacky Chevasson présentait deux oriflammes suspendus à des tubes colorés, et au bas desquels pendaient de minuscules sculptures ovoïdes couvertes de têtes de petits personnages. 

          Entre les deux, deux exubérants tableaux composés de lignes courbes profondément décolletées, semblant de prime abord uniquement décoratives. Puis, un regard plus attentif s'apercevait que les ectoplasmes ainsi générés donnaient en fait corps , sur l'un, à d'étranges bestioles aux longs cous terminés par des têtes bizarroïdes, chacune dardant plusieurs becs crochus. Tandis que sur l'autre, des mutations donnaient vie à des humanoïdes à tête animalière, côtoyant des serpents de mer au dos couverts de nageoires feuillues, prolongées par des queues annelées terminées par d'inquiétantes griffes ! 

          Finalement, pas innocentes ces deux œuvres en apparence tellement inoffensives ! Au fond Jacky Chevasson serait-il capable de créer des œuvres qui ne seraient que décoratives, desquelles serait absente toute vie ? Il est évident que non ! J.R.

VOIR AUSSI : 

TEXTE DE JEANINE RIVAIS :  "LES ŒUVRES EN PAPIER MACHE DE JACKY CHEVASSON" : BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA N°56 de Décembre 1995, IIe FESTIVAL DE PRAZ-SUR-ARLY. 

Et http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS RETOUR SUR PRAZ-SUR-ARLY 1995

GERARD DIETSCH

          Seuls, réduits à la tête ; ou groupés en cercle posés sur un buste dépourvu de membres, rattachés alors les uns aux autres tels des siamois, les humains de Gérard Dietsch prouvent son talent à lisser le bois, fouir curieusement ses entrailles pour y trouver la forme évocatrice d’une bouche, de grands yeux regardant le visiteur... intailler ses nœuds et ses courbes pour former de nouveaux rythmes. Et puis, peindre les yeux en bleu vif, les bouches toujours ouvertes en rouge, les dents saillantes en blanc, chacun contrastant  avec le brun foncé de ces petits individus toujours chauves. Ajouter enfin des scarifications, ce qui l'emmène peut-être vers de lointains atavismes africains ? 

          Tous les "bûcherons" disent que, pour créer, ils doivent se sentir en sympathie avec le bois. Lorsqu'il en va ainsi pour lui, le sculpteur génère à larges coups de son outil, des sourcils arc-boutés dans un visage étonné ;  des traits autoritaires, accusés ; des bonshommes aux yeux exorbités demi-souriants… Œuvres toujours couvertes d'un vernis épais et brillant, confortant le destin pérenne de ces œuvres massives.

J.R. 

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

STEPHANE MONTMAILLER

          Quand il n'est pas à la pêche (la preuve de cette passion figure souvent sur ses toiles), Stéphane Montmailler peint ou sculpte. Une œuvre très hétéroclite en apparence, et néanmoins tellement personnelle qu'il est impossible de la confondre avec d'autres.

          Certes, s'il ne peint pas des poissons, c'est l'humain qui le préoccupe ! L'humain jamais très à l'aise, peint sur des décors non définis mais toujours inquiétants (sols incandescents, éléments incertains volant autour du personnage sur fonds de ciels tourmentés ; couples jambes plongées dans l'eau, côte à côte mais ne se regardant pas, bras le long du corps (ne s'enlaçant donc pas), raides devant de vieux murs apparemment couverts d'indescriptibles plantes rudérales. Le tout peint avec n'importe quel outil qui lui tombe sous la main, ses doigts en premier lieu, le pinceau par hasard, et pourquoi pas la truelle ? Et toujours dans des teintes de gris, de rouges mêlés à des      bruns…

          Parfois, il se détourne vers la mythologie et c'est alors un minotaure, lascivement allongé, semblant flotter au-dessus des ruines d'une ville ! 

          Lorsqu'il quitte les humains, Stéphane Montmailler devient Art-récupérateur, et avec les richesses découvertes lors de ses glanes, abandonnant peut-être son mal-être, il se lance dans des œuvres pleines d'humour teinté d'un brin d'ironie piquante. Déferle alors un bestiaire surprenant d'imagination : tatou protégé par des grilles de moulins à légumes ; chèvre à bascule ; grenouille grimpant à l'échelle pour indiquer qu'il fait beau dans le monde animalier de l'artiste !... Réalisé chaque fois en des tailles plus grandes que nature ! 

 

          Et c'est ainsi que, sous ses airs d'éternel jeune homme hors-normes, Stéphane Montmailler est passé maître dans l'art de peindre le monde tel qu'il ne veut pas qu'il soit ; et les bêtes telles qu'elles devraient être ! J.R.

VOIR AUSSI :

ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.doc/  Rubrique FESTIVALS : Banne 2013.

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

ELISE SENYARICH 

 

          Chacun pourrait penser que la vie fut si chienne pour Elise Senyarich, qu'elle l'a quittée à quarante-deux ans. Et pourtant, il semble bien que non, puisqu'elle concluait l'un de ses textes par cette exclamation : "Merci la vie. Oui. Merci, merci la vie".

C'est qu'en fait, contrairement à beaucoup d'artistes, elle eut la chance d'être aimée et comprise par sa famille, par ses parents qui, lui survivant, font de leur mieux pour assurer la pérennité de son œuvre.

          Une œuvre étrange, où se succèdent les univers les plus divers, inattendus, contradictoires parfois puisque allant d'un portrait sophistiqué à une petite scène sortie tout droit de l'Art brut ; d'une narration très évidente à une autre complexe, difficile à décoder : telle cette œuvre de 1992 où se détachent, blancs sur fond rouge monochrome, un très militaire personnage masculin nu, genoux cagneux, assis sur une chaise longue, tenant sur son ventre ce qui pourrait être une gourde, et faisant gicler dans un récipient à ses pieds, de l'eau dans laquelle trempe ses mains un individu dépecé, à tête canine ou chevaline ? Ou carrément un animal impossible à définir ? Le visiteur constate que les fesses de l'homme de profil sont sans ambiguïté découpées sur son flanc gauche, que la raie des fesses de l'homme/animal surmontée d'une minuscule queue, est très nettement marquée. Perplexe, il se demande s'il nage dans le fantastique, si cette relation est à connotation zoophile, ou s'il s'agit tout simplement d'un homme en train de laver son chien ? Et il n'a aucune réponse à formuler ! 

          Autre matière à réflexion, les "tableaux combinés" ou "combis", tellement denses qu'il est impensable de les décrire, ni même de savoir par quel détail commencer ? D'autant que des écritures, répétitives parfois, comme ce "Senyarich 2006" sont là pour donner des indications inutiles, voire dubitatives, telle cette "Solitude" au milieu de la foule ! 

          Heureusement, toutes les propositions d'Elise Senyarich ne sont pas à problème ! Par contre, si toutes sont intenses, colorées et dramatiques, ce visiteur regardant les dates, est confondu par la vitesse à laquelle l'artiste passe du papier à la toile, de la peinture au dessin, comme si elle ne suivait aucune méthode, comme si la façon très compulsive de jeter l'"histoire" sur le support était une question de vie ou de mort, d'urgence absolue en tout cas ! Et que la vitesse d'exécution était essentielle ! Ainsi, M. Senyarich a-t-il dévidé, à la grande surprise du public, un "feuilleton" pictural réalisé avec les œuvres d'une seule journée, avançant, encore, passant à plage suivante, encore, encore… peinture… crayon… encore…  comme si cette compilation devait ne jamais s'arrêter ! 

          Les questions qui surgissent sont alors : Qu'est-ce qui urgeait tant dans ces créations ? Etait-ce une peur instinctive qui lui faisait craindre de manquer de temps ? Avait-elle tant à exprimer qu'il lui fallait se hâter ?  Auxquelles s'ajoutent : A quels contes connus ou imaginaires faut-il rattacher les saynètes ? Et quels sont les personnages "vrais" ou imaginés qui figurent dans ses portraits ? 

          Car, les portraits tiennent une place importante dans l'œuvre d'Elise Senyarich : Certains pourraient être des copies de Picasso, mi-terriens/mi allochtones ; d'autres promèneraient le dimanche la famille dans la campagne… Ici, une espèce d'ogre semble prêt à dévorer le monde, tandis que, paradoxe inattendu, un garçon rit si fort que sa bouche semble faire le tour de sa tête. Là, un autre serait sans doute la Joconde ? Auquel on peut adjoindre ce couple arabe (peut-être) où l'homme barbu arbore une écharpe nobiliaire, tandis que la femme s'abrite non derrière un voile mais derrière ses lunettes qui lui mangent le visage ? Et que dire de l'ironie de ce couple tellement impersonnel que la femme est marquée haut/bas afin que nul ne confonde ? 

        Peut-être ? Sans doute ? Possiblement ? Autant de questionnements jalonnant cette œuvre si difficile à pénétrer, si proche et si loin de la réalité ; si proche et si loin de l'imaginaire universel ; si paradoxale et si logique ; si obscure et néanmoins si attachante qu'il n'est pas étonnant que la femme en elle et l'artiste se soient écriées : "Merci la vie. Oui. Merci, merci la vie".

Jeanine RIVAIS

 

 TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

M'BOOKA MONSENGWO

 

        S’agit-il, pour M'Booka Monsengwo, de s’évader d’un quotidien contraignant, lui qui est à la fois sculpteur et peintre, et qui à l'évidence, ne s'intéresse qu'à l'humain ?  Ou bien, cet artiste, a-t-il gardé depuis l'enfance, le goût des civilisations énigmatiques et s'est-il dévolu le rôle de l’ethnologue imaginatif de peuplades étranges qui seraient, pour les Terriens, des mutants ? 

          Toujours est-il que, sculpteur, il est l’auteur d’une véritable mythologie très personnelle d’allochtones humanoïdes tous conçus en des métaux argentés dont les textures variables captent différemment la lumière. Parfois leur corps est compact et propose de riches et multiples broderies métalliques ; d'autres fois, ils ne sont que croisillons très esthétiques ou petites pointes verticales, fixées à intervalles réguliers autour d'un cercle de même métal ; d'autres fois encore, ils sont constitués d'un amalgame de pleins et d'intercalaires.

          Mais chez  tous, un long cou sépare la tête du corps et les jambes sont soudées sur un important volume métallique, sans doute pour conforter leur stabilité. Et, que leur tête soit ronde, ovale, ou trapézoïdale, de gros yeux très surlignés leur permettent d'observer le monde des Terriens qui, apparemment, ne laisse pas de les surprendre, car leurs bouches sont toujours en O !  

          Une hiérarchie sociale existe-t-elle, dans leur lointaine galaxie ? En tout cas, certains, masculins apparemment, sont coiffés d'une lourde couronne ; d'autres (les reines peut-être) d'un minuscule appendice à antennes perché au sommet du crâne. Mais tous, royauté ou simples quidams, sont chauves ! Et si, hiérarchie il y a, elle existe aussi dans les couches sociales, car certains tiennent dans chaque main, ce qui ressemble fort à un outil, tandis que le roi a les bras croisées dans le dos, l'air de celui dont la fortune est faite ! 

          Bref, leurs anatomies  massives ou à claire-voie, sont toujours  sophistiquées, faites de mille ajouts aux formes variables, et posées là, face au spectateur, avec une tranquille certitude.

 

          Beaucoup moins conçues dans une même veine, les peintures de M'Booka Monsengwo témoignent de différentes inspirations, tantôt réalistes, tantôt fantasmagoriques : Y sont proposées chaque fois des oeuvres jetées sur la toile ou le papier, comme des "visions" qui, une fraction de seconde, éblouiraient l'imagination du peintre ; et il faut alors parler du talent de coloriste de cet artiste qui affectionne les teintes chaudes ; et, grâce à la conjonction de couleurs pures sur couleurs pures, donne à ses oeuvres une connotation de vie et de grande convivialité. 

          Des oeuvres qui, toujours centrées sur le thème humain, comme en attestent les titres ("La combattante" ; "La Dame", "Les trois personnes"…) permettent à l'artiste d'affirmer que lorsqu'il peint, il a bien les pieds sur terre ;  que son ouverture sur le monde, son implication  sont permanentes, bref qu'il est témoin de son temps, alors que paradoxalement, les factures différentes rendent son oeuvre intemporelle. 

 

          Ainsi, sculpteur ou peintre, M'Booka Monsengwo offre-t-il au visiteur, une oeuvre puissante et singulière ; qui, en raison de sa réflexion personnelle et de ses ethnologies fantasmatiques pour l'un, son chromatisme, sa stylisation pour l'autre, le place dans la famille protéiforme des créateurs inclassables.

Jeanine RIVAIS

 

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KARAVAN TATOO

 

L'artiste prévu LAURENT ROUSSET ayant renoncé à exposer, la directrice du Tatoo a invité ELISE SENIARICH, choisissant de n'exposer que des portraits pour garantir l'unité de l'exposition. 

 

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MEDIATHEQUE DE VILLARS

SEBASTIEN CHARTIER

 

          Œuvres de terre, les créations de Sébastien Chartier, bestiaire ou humains, sont une approche figurative de la sculpture, explorant uniquement des animaux puissants ou des personnages solides. 

          Les unes se reconnaissent à une forme achevée, presque réaliste, qui reste partiellement prise dans un socle à peine dégrossi. Ainsi, concernant ses têtes de taureau, le résultat toujours frappant est-il un équilibre entre un modèle englué dans la masse brute et un élan donné à l'oeuvre qui semble ainsi prête à s'en échapper. 

          Différents sont les "portraits" de gorilles, entièrement libérés de la gangue, visibles donc en ronde bosse ; mais où seuls les éléments essentiels ont été gravés : yeux clos, narines béantes, oreilles légèrement en relief, aspect granité de l'ensemble obtenu grâce à une terre très chamottée : un travail très expressif conçu avec une remarquable économie de moyens.

          Différent encore, l'homme furieux cachant son visage dans ses mains, l'arrière de la tête étant creux, et l'artiste jouant des ombres et des lumières sur les reliefs des pommettes et le dos des mains.

          De ses diverses approches de la terre, Sébastien Chartier développe une recherche sur l’esthétique de la forme et puise son langage dans le jeu des surfaces et les lignes de tension.

J.R.

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

 

PHILIPPE BOUILLAGUET

 

          Comme la nature, il semble bien que Philippe Bouillaguet ait horreur du vide ! Créateur sans limites, sans contraintes, toutes ses œuvres ont une géographie commune : un espace sans définition sociale, sans géométrie ni perspective. Simplement, un "territoire" maculé de taches de peinture de couleurs violentes (noirs, jaunes ou rouges crus ; verts et bleus plus épisodiques, en aplats fortement délimités. Jamais de blanc ou juste une pointe pour mettre en valeur un détail, une paire d'yeux…). 

          Et, avant même d’avoir perçu l’"histoire" portée par ces réalisations, quel régal pour les yeux du visiteur, que ces jeux de couleurs sans hiatus et ces formes aux volutes compliquées ! au “centre” desquels, tel un fœtus dans son milieu confortable, se trouve un "être vivant" ! il faut s’approcher pour percevoir dans ces taches  polychromes ce petit personnage toujours homomorphe, toujours de face, homme ou femme, en buste, le reste du corps disparaissant dans les environnements déjà évoqués. Puis un autre, un autre encore… un lapin à demi-caché, des masques un peu animaliers… 

          D'autres fois, c'est une tête qui apparaît, plein cadre, visible de loin dominant le fond. Et,  immédiatement, intervient le sens inné de la mise en scène de Philippe Bouillaguet. Car c’est bien là le sommet de son art : savoir, l’air de rien, uniquement avec un trait (volontairement) perturbé, parfois haché, comme incertain, rendre évidente dans leur immobilité de façade, l’existence de ses personnages. S’imposent alors les gros yeux charbonneux pleins d’expressivité ; malicieux, penauds, dubitatifs... méchants peut-être. Et puis de larges oreilles décollées des crânes aux cheveux hirsutes, possiblement coiffés d'un chapeau. La bouche, grande ouverte, de guingois toujours. Le nez démesuré ou crochu, narines dilatées. Nœud papillon supportant un menton en galoche ! Il se peut aussi que le corps disparaisse dans une sorte de lange, et que le personnage couché, incontestablement adulte, ait à la bouche une sucette à la manière des enfants, tandis que ses mains à trois doigts brandissent des pancartes porteuses de manifestes illisibles. 

          Subséquemment, dans l'un et l'autre cas, ce sont sur les cimaises, d’étranges instantanés de non moins étranges figures, intemporelles, toutes semblables et néanmoins chaque fois différentes, dessinées sans souci de réalisme, exécutées de façon très rudimentaire : Simples, tellement simples que, de prime abord, elles ressemblent à s’y méprendre à des caricatures ! 

          Inutile, donc, de chercher dans ces compositions, morphologies raffinées, narrations ou descriptions complaisantes. Seules sont évidentes les silhouettes à l’impact à la fois brutal et étonnant de cette oeuvre éminemment personnelle. Tout se passe comme si, désireux de rendre autant de souvenirs rémanents, d’impressions brèves fouettant comme des flashes son imaginaire, Philippe Bouillaguet gardait en tête –au cœur aussi, vu la constance de son investissement pictural–, les caractères essentiels de l’être humain ; et, en toute spontanéité, les restituait sur sa toile ! Il offre de ce fait au visiteur, une oeuvre puissante et singulière ; qui, en raison de sa réflexion personnelle, l’écarte de la création brute dont sa démarche esthétique est pourtant proche ; qui est souvent un peu naïve par la manière dont le concernent ses états d’âme traduits par chaque tableau ; mais qui surtout, par son chromatisme, sa stylisation et son goût du “portrait” le place dans la famille protéiforme des Expressionnistes.

          Tandis que, pour le visiteur qui, au cours de cette circumnavigation et au gré de sa subjectivité a simultanément aimé/refusé, questionné/suggéré ce qu'il voyait, ou aurait aimé voir… le point d’interrogation reste majuscule. Mais n’est-ce pas l’apanage de toutes les œuvres puissantes, qu’elles ne se laissent jamais tout à fait pénétrer ?

          Finalement, cette absence de définitions n'est autre, pour Philippe Bouillaguet, qu'une quête de liberté, apportée par chaque nouveau tableau. Le plaisir, l'envie d’exprimer l’espace, la lumière, la résonance et, par opposition, d’aborder le volume, au moyen du trop-plein. Pour cet artiste, qu'importe la démarche, puisqu'il parle toujours de lui, de l’être humain, de la sociabilité, des regards qui parlent de beaucoup de choses ; ou de l'absence de regards qui l'emmène vers d'autres orientations… 

JEANINE RIVAIS

TEXTE ECRIT APRES LA BIENNALE DES ARTS SINGULIERS ET INNOVANTS DE SAINT-ETIENNE 2018. 

 

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GALERIE REVE D'AFRIQUE ET D'AILLEURS

MYLENE FAVERGEON

 

Le monde était-il tout décoré de fleurs, pour Mylène Favergeon qui l'a pourtant quitté si tôt ? Il semble bien que oui, puisque nombre de ses œuvres ont l'air d'en être : Groupes de petites figures géométriques qui s'enchaînent, s'emboîtent, se torsadent de sorte qu'il est impossible de trouver le début et la fin de ces sortes de rébus. Toujours au centre d'un vaste espace blanc. Rehaussés aux crayons de couleurs. Dans lesquels le visiteur peut subjectivement détecter un petit bonhomme aux gros yeux bleus et béret vert, ou les ailes d'un avion, etc. 

Et puis, parfois, toujours au centre de la feuille blanche, la tête souriante d'un gentil personnage uniquement linéarisé. Et surprise ! un landau (retour de l'artiste vers l'enfance ?) tout habillé de tissus fleuris ; et à la place du bébé, des fleurs ! Une abondance de fleurs !  

NICOLAS NUTTIN

          "Apercevez-vous quelque chose ?" demande Poussin à Porbus dans Le Chef-d’œuvre inconnu de Balzac. "_Non. Et vous ?" _ Rien" ! 

 Et pourtant, il y a tant à voir dans les compositions abstraites de Nicolas Nuttin ! Le processus qu'il emploie est complexe et médité, malgré l’incohérence apparente de sa gestuelle personnelle ; et c’est l'effet de surcharge qui provoque l’électrochoc chez le visiteur confronté à la difficulté de sa tentative : faire surgir une figure qui réponde à l’expérience de l’immédiateté de la vision de la chose habituellement  vue : pénétrer dans l’espace de l’œuvre alors qu'il n'est pas délimité physiquement.

C'est qu'en effet, une fois franchi le labyrinthe des formes minuscules qui s'enchevêtrent, s'entrecroisent, se bousculent, il réalise qu'il lui faut "se contenter" de  la multitude protéiforme de traits, courts, saccadés… larges, réguliers… étroits, aléatoires… apprécier la beauté des combinaisons de couleurs ; des embrouillamini de teintes allant –toujours- des ocre, des violines,  aux linéarités noires… S'apercevoir finalement que la quantité, la largeur et la longueur des lignes et des formes donnent un rythme certain à la toile. Et que toutes sont organisées, allant vers le centre, comme si là, se situait l'œil du cyclone !

J.R. 

 

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MUSEE D'ART ET D'INDUSTRIE

 

JEAN BRANCIARD

 

"L'entassement qui fait un peu marché aux puces", tel est d'après Jean Branciard le principe de ses créations. Où se conjuguent éléments de récupération organiques et minéraux surtout métalliques. Donnant un ensemble baroque que l'on pourrait classer sous le label "Véhicules rouillés", bateaux en particulier. "Rouillés" car sur ces œuvres, la trace du temps est primordiale. Conçues avec la certitude que chaque ajout est irrémédiablement "appelé" par le précédent et appelle aussi définitivement le suivant de façon à ce que, à partir de  la disparité, chaque œuvre prenne un  sens, devienne une unité. 

J.R.

VOIR AUSSI :

ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS http://jeaninerivais.jimdo.com Rubrique Festivals Banne 2010.

 

STEPHANE CERUTTI

 

Des assemblages, des volumes variables, souvent fantaisistes, toutes idées et libertés qui ont été pour Stéphane Cerutti une vraie révélation ! Oeuvres en mouvement, élancées, ascendantes ; dont la forme, quelle qu’elle soit, évoque des oiseaux. Fragiles, vulnérables. Et cette fragilité, cette vulnérabilité sont devenues une longue histoire d'amour entre lui et son sujet. Un travail de fine ciselure où chaque ligne, chaque cercle, chaque point… joue de la ligne, du cercle ou du point précédents. Où le visiteur a la chance de voir, certes, mais aussi d'"écouter" les sculptures musicales et de "toucher"! 

J.R.

VOIR AUSSI :

TEXTE DE JEANINE RIVAIS : "STEPHANE CERUTTI OU LE REVE D'ICARE" : N° 72 Tome 2 DU BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA. 

Et aussi :  http://jeaninerivais.fr Rubrique ART SINGULIER.

 Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003

 

MYKOLAS LUKOSEVICIUS

 

Cet artiste présentait une seule œuvre : un caddie de supermarché "arrimé par un ensemble moteur-boîte de 2 CV Citroën" : Chaque élément important était notifié, à la manière d'une liste d'ingrédients placés sur un établi de garage ! La vie suspendue de matériaux, accolés en des rapprochements inattendus, voire  suspects ! 

J.R.

LOUIS MOLLE

 

De ses volumineuses  créatures construites naguère en trois dimensions, toujours travaillant le carton, le tissu, le bois, le fer, la céramique etc., Louis Molle en est venu à de jolies et amusantes figurines murales, humanoïdes certes, mais totalement irréalistes, au gré de la fantaisie de cet anar picturo-sculpteur ! Directement implantées, car vu les fantaisies de leurs anatomies, il est impensable de leur infliger un cadre. Et ce sont alors des sarabandes de créatures portant des noms bizarres, mi-allochtones par leurs becs énormes, leurs cornes nucales, mi-terriennes, par leurs longues jambes fildefériques, leurs jupettes et leurs bonnets pointues tirés des contes de fées ;  leurs formes jouant les unes des autres ; leurs couleurs nées d'amalgames acryliques et autres, se mariant avec bonheur, -car l'artiste est un coloriste-né-, tout ce petit monde batifolant sur les cimaises comme des enfants dans un parc public !  

Une manifestation que le spectateur a un plaisir fou à voir et revoir ; surpris de toute cette fantasmagorie qui s'est proposée à lui, repartant le cœur joyeux car, comme le dit le proverbe : "les plus beaux moments de la vie, ne sont-ils pas ceux que l'on a vécus en rêve" ?

J.R.

VOIR AUSSI :

ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.fr Rubrique Comptes-rendus de festivals Céramiques insolites Saint-Galmier 2006 

 

GERARD VISSER

 

Baptisé "Facteur de machines" ou "poète mécanique", Gérard Visser crée et fait bouger tout ce qui lui tombe sous la main au fil de ses glanes. Tout cela coupé, compressé, soudé, papiers marouflés…  et recyclé dans ses machines délirantes pour les faire jouer des panards,  tourner leurs anatomies bizarroïdes… Toutes parlant, chantant, couinant, pleurant, rageant… Racontant en somme des quotidiens revisités par l'artiste ; des péripéties drolatiques ; des rêves d'adultes devenus enfants ou d'enfants jamais trop grands pour s'amuser, s'émouvoir devant ces vies saugrenues qui sont là pour le surprendre! 

J.R.

VOIR AUSSI : ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVAL IVe BIENNALE DE LYON 2011.

 

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ROCHETAILLEE GALERIE DE L'ECHAUGUETTE

FABRICE ANNEVILLE-CONSTANCE 

 

 

 

 

 LES AGGLOMERATS DE FABRICE ANNEVILLE-CONSTANCE

  Comment comprendre l'effervescence créatrice qui semble animer Fabrice Anneville-Constance  ? Et qui se traduit par le fait qu'au  premier regard porté sur  ses œuvres, le visiteur ne voit qu'un véhicule plus ou moins de guingois, ou un agglomérat porteur de formes contiguës enchevêtrées, blanches ou très colorées, toujours cernées d'une ligne noire ? Et puis, il croit déchiffrer, comprendre autre chose, pense se tromper, recommence donc… Et la "lecture", le déchiffrage de l’image l'amène à développer les strates successives de cet imbroglio pictural. Naissent enfin des certitudes : Il y a bien un ou des personnage(s) dans ce méli-mélo de formes circulaires (car apparemment, Fabrice Anneville-Constance n'a jamais entendu parler de l'angle droit !). Ici, de gros yeux se détachent soudain, parfois fixant ce visiteur, d'autres fois louchant… Puis le corps se sépare de l'agrégat de formes ; ici, c'est bien le conducteur, là le pilote, ailleurs le gourmet(gourmand), fourchette brandie, qui mange ses doigts et se régale… Apparaissent d'autres formes humanoïdes, des têtes sans visages, des bustes sans membres, etc.

          Alors, une question –voire plusieurs- se pose : Qui sont ces étranges personnages ? L'artiste est-il en recherche d'identité ? Pour lui-même ? Ou pour ce qu'il veut exprimer dans ses peintures ? Est-ce lui, finalement, qu'il cherche à construire dans ce monde déstructuré, déglingué et tendu, chaque fois restructuré cahin-caha ? Si tel était bien le cas, ainsi pourrait s'expliquer qu'il ne réussisse pas à signer de son nom complet ; qu'une partie se promène sur la scène au gré de sa fantaisie, large, ondulante, avec parfois une faute d'orthographe dûment corrigée ; tandis que l'autre se trouve au lieu classique des signatures d'artistes, en bas à droite, serrée, tassée, abrégée parfois ! Un artiste en construction, à la recherche  de son identité, en somme ! 

Jeanine RIVAIS

 

ISABELLE GOMEZ  

 

          Faut-il appeler ex-voto les créations d'Isabelle Gomez, toutes construite sur un même schéma, et vouées à quelques saints ou saintes sur un mode ironique peut-être, en tout cas faussement pieux, avec chacun une façon pseudo-sérieuse de jouer sur les mots, grâce à des titres qui en disent long : "Les affirmations de Saint-Doute", "Le renoncement de Sainte-Chérubine", "Le doute de Sainte Filoute", "Sainte-Nitouche : l'annonciation", etc. ?

          Tous les saints à la même enseigne, donc, enclos dans une sorte de boîte carrée dépourvue de couvercle (y eût-il eu un couvercle de verre, il eût fallu parler de reliquaires !!), dont l'intérieur est peint en gris violacé.  En haut, dans un encart en demi-cercle, est clouée une bande métallique colorée, porteuse d'un fragment de publicité. Et, en bas, un prénom, un couvercle de bouteille en forme de cœur, des petits cubes... Une toile effrangée, écrue ou blanche, sert de support à chaque installation. Là, commence la très solennelle vie de la Bienheureuse ou du Saint !  Au centre, surmonté d'un bouquet ou d'une couronne, est un cadre réalisé apparemment par l'artiste au moyen de broderies, fils en tous genres, peut-être branchettes peintes, etc. Et à l'intérieur du cadre, une photographie dont les tons grisés ne laissent aucun doute sur l'ancienneté,  féminine ou masculine, jalonnée de boutons ou rubans : le saint des saints en somme !   

          Et puis, aux quatre coins de l'horizon, soigneusement cousus au point arrière, des sortes d'encarts bruns ou gris présentent qui un ange, qui une joueuse de flûte, qui des silhouettes blanches, qui des dessins indéfinis pouvant suggérer des pendules, le passage du temps, donc, sans aucune certitude ! Ce bel ensemble piqué du haut en bas par un fil doré, rouge ou blanc, travaillé à petits points ! 

          Aucune ornementation, aucune fioriture, dans ce travail d'une austérité toute… monacale ! Mais tant de retenue fait appel à une grande dextérité et un choix de matériaux savamment conciliés prenant possession de l’espace, donnant à l'œuvre du volume, du relief. Sans parler de l'aspect désuet de l'ensemble  qui ramène le spectateur au temps où il était bon de visiter l’armoire à linge abandonnée dans quelque grenier… d'observer la marque du temps sur les vieux draps qui portent la mémoire… Penser à tous ces gestes anciens, à toutes ces mains cloîtrées qui ont travaillé de manière besogneuse. Et revenir à Isabelle Gomez qui a su, à travers la sobriété de ses œuvres, avec son soupçon d'ironie, transformer cette création en plaisir, naturellement. 

Jeanine RIVAIS

 

RENE MATHIEU  

 

          HOMMAGES à René Mathieu qui nous a quittés et dont les peintures étaient présentées par son épouse, ces œuvres sont surprenantes par une grande explosion de couleurs, de complémentarités et d'oppositions qui s’enchevêtrent ; de bleus crus ou foncés, de rouges allant jusqu'à l'orange, de diverses nuances de verts …

          Surprenante également, sa façon de passer du linéaire au réalisme, voire de les mêler sans états d'âme sur un même tableau. Postant au centre l'humain "réel", et l'encadrant de têtes fantaisistes, de personnages à têtes de mort, d'os croisés et autres symboles de pirates, sur fonds découpés façon puzzle … Ou bien en venant carrément à la fantaisie d'une naïade nageant entre algues et poissons ; à la foule tassée et silencieuse des manifestants syndicalistes ! Difficile, en ce dernier cas, d'être plus réaliste! 

          Par ailleurs, n'était cette fameuse manif (d'une actualité brûlante par les temps qui courent), le spectateur pourrait penser que cette œuvre est totalement intemporelle ; le décor dans lequel évoluent les êtres réalistes ou fantasmagoriques, n'ayant aucune connotation de temps, d'espace, de milieu social. Là encore, mélange d'aujourd'hui et de nul ne sait quand, nul ne sait où, peut-être avec lui, dans son nouveau monde, qui sait ? J. R.

 

LOUIS-ALBERT CHANUT

 

           Les sculptures de Louis-Albert Chanut sont- elles en bois, à cause des stries, des granités, des piquetages… ? Sont-elles en métal, à cause de leur  façon de capter la lumière ?

       En tout cas, ses visages sont intemporels, masques de tous les âges, sans aucune définition sociale, à la fois fantasmes et obsessions de la réalité. Allant parfois jusqu'à l'allégorique, lorsque son personnage déploie sa chevelure en ailes, comme pour prendre son essor. Mais la plupart, -dont ne sont réalistes que les têtes, les troncs n'étant que biseautés pour refléter la lumière comme il est dit plus haut-, ont les yeux vides, nez protubérants, lèvres lippues mi-closes. Ces personnages sont créés à l’image de la vie, dans cette zone d’ombre un peu mythique, entre deux états aux frontières mal définies, de la condition humaine ! 

       

  Complètement différents sont les bas-reliefs, conçus essentiellement dans une mise en scène, une forme théâtrale. L'artiste semble s'inspirer surtout du quotidien ("Contrat de drague à consentement mutuel" qui montre deux amoureux sur une barque dans un cadre très bucolique)  ; des contes ("Allons voir ailleurs" où évoluent sans ambiguïté Don Quichotte et Sancho Pança), des légendes ("Reverrons-nous le soleil ?" où une main énorme domine des spectateurs serrés les uns contre les autres, tandis qu'un immense soleil occupe la moitié du tableau. Et puis, sans titre, ce qui est apparemment "Le radeau de la Méduse") ;  la mythologie, avec à l'évidence, le recours à l’inspiration antique ("Oracle", où un personnage de dos, grimpé sur un rocher, semble tripatouiller dans une sorte de magma duquel émergent des fleurs). Tous ces thèmes visibles dans les accessoires qui ont aussi pour fonction de situer l’histoire, et que corroborent les titres. 

          Ainsi, à défaut de changer le monde, Louis-Albert Chanut en a-t-il inventé un bien à lui, poétique, positif, voire complètement imaginaire. Avec le bas-relief, il semble avoir trouvé l'harmonie de ce qu'il aime faire : la forme, le relief et la couleur, brune toujours, faite de vernis de différentes teintes qui génèrent ainsi des ombres, des pénombres, des clairs-obscurs et quelques clartés.  L'image de la vie façon Chanut, en somme.

Jeanine RIVAIS

 

HACENE-GEORGES BOUZIANE

 

          D'origine algérienne, très influencé par sa culture originelle, Hacène-Georges Bouziane ne signe ses œuvres que de son premier prénom, ce qui confirme sa volonté de rester dans l'esprit qu'il avait acquis de l'autre côté de la Méditerranée. 

          Autodidacte, il peint ses tableaux sans proportions et sans perspective, mais il possède intuitivement la capacité de créer, à partir de ces disproportions répétitives, une sorte de “respiration” équilibrée, et subséquemment une grande harmonie. Ces déséquilibres pourraient bien, en fin de compte, être les éléments essentiels qui constituent l’originalité de ce créateur, et rendent ses oeuvres immédiatement reconnaissables.

Des oeuvres sereines, possédant une évidence tranquille qui donne au spectateur l’envie de s’asseoir devant et “écouter” les histoires qu’elles lui racontent ! Des histoires en couleurs douces, pour lesquelles, là encore, Hacène possède un véritable instinct : jamais de noirs, mais des bruns clairs de la terre africaine brûlée par les millénaires ; des bleus des ciels de plein été ; les verts dulcifiés des arbres écrasés de soleil dont les ors génèrent la luminosité de l’ensemble.  Quelques beiges rehaussent ces plages colorées et font de ces tableaux en demi-teintes,  des “images” calmes, reposantes, voire oniriques : Car apparemment, Hacène ne “parle” jamais d’histoires “vraies”. Toutes pourraient, peut-être, être conçues dans un état de demi-veille, à un moment où le corps ne distingue plus le réel de la fantasmagorie. Là, commencerait la “vie peinte” de ce créateur ! Un monde sans angles droits, tout en courbes et ondulations, comme une sarabande, où tout s’enchaîne en lignes souples, involutées.

Un monde tourné vers la mémoire, du fait qu'Hacène est avant tout fidèle à sa culture ancestrale, à la transmission orale de récits et de légendes : ainsi de cet arbre à souhaits, tellement chargé de vœux et d'espoirs que ses branches touchent le sol ; ainsi de cette mosquée derrière laquelle de minuscules personnages (?) se baignent dans une eau (jaune), tandis que dans le ciel d'un bleu azur, le soleil rit si fort que sa bouche rejoint ses oreilles ; ainsi encore de cette tente plantée dans une oasis où l'eau est abondante et la végétation luxuriante, tandis qu'au premier plan est posée une corbeille d'où débordent des fruits !... 

Ajoutons que cette impression de culture arabisante est renforcée par la présence innombrable de tesselles vraies ou imitées en de savants pointillismes, et la multitude des arabesques (seul moment où il s'autorise un peu de noir) accentuée par des éléments intégrés à ses paysages : dallages bizarres ressemblant plutôt à des tapis dont les dessins opposent leurs compositions florales et leurs strictes symétries aux tentures retombant de part et d'autre du tableau. 

          Mais ce qui est le plus surprenant de la part d'un artiste venant d'un pays où la moindre ruelle est envahie par des cohortes de gens, c'est l'absence de population ! Personne dans ces paysages ! Car finalement, le soleil évoqué plus haut rit-il bien au-dessus des baigneurs ? La scène est suffisamment imprécise pour qu'il puisse s'agir d'animaux ? Et puis, trois personnages à peine découpés sur le fond de l'arbre devant la tente également évoquée ! Et c'est tout ! Alors où sont les gens dans le monde d'Hacène ? Est-ce que, parce qu'il est fidèle à ses racines, qu'il évite toute transgression des hadiths et se limite à ses paysages vides, même s'ils sont remarquablement pittoresques ?  

Et c’est finalement cette omniprésence d’éléments africanisants, d’affirmations identitaires, de travail mémoriel et de faculté d’invention qui différencient cette oeuvre de tant d’autres créations conçues dans le même esprit ; qui fait le charme, la puissance et la poésie de l’oeuvre d'Hacène ; à la fois creuset d’une tradition, et résolument plongée dans le souvenir. 

Jeanine RIVAIS

 

MIREILLE FAURE

     

          "Il était une fois une famille Loup qui avait deux enfants…". Ainsi pourrait s'intituler l'œuvre de Mireille Faure. N'était que ces loups sont humanoïdes de la tête aux pieds, que leurs actions, leurs relations familiales sont humaines !  Bref qu'il s'agit bel et bien des actions et réactions d'une famille ordinaire sur la planète Terre ! 

          Depuis la nuit des temps, l’homme a tenté de reproduire les animaux qui s’éveillaient en lui dès que sa raison sommeillait et qui hantaient ses rêves les plus fous. Et, au fil des âges, dans toutes les formes d’art, les créatures fabuleuses ont été une puissante source d’inspiration. Et voilà l'artiste lancée dans une aventure narrative mettant en scène un petit monde pittoresque, saisi sur le vif ; Un monde appartenant –peut-être- à son quotidien… transformé, enjolivé… jusqu’à tenir davantage du conte que de l’histoire banale.

          Un conte qu’elle réalise en pied ; par des portraits individuels ; ou des groupes dans lesquels les protagonistes présentent un incontestable "air de famille" : Long nez volumineux incontestablement lupin entre des yeux ronds et perçants aux pupilles noires ; bouches minuscules, réduites à un O noir souvent tordu ; crânes chauves aux oreilles pointues, dardées, comme à l'écoute. Vêtements sans âge, sans connotation sociale. 

          Néanmoins, rien d'inquiétant dans ce parti pris d’animaux carrément posés sur leurs pieds plats ; il s’agit simplement d’un bestiaire commun, presque quotidien, pacifique. Constitué d’animaux bien connus des humains. Placés côte à côte, en un amusant salmigondis où, s’ils sont immédiatement reconnaissables, ils n’en restent pas moins étranges.  Un monde d’où ne surgit aucun malaise, bien au contraire ! Le côté itératif des ressemblances, la récurrence des traits "familiaux" caractéristiques génèrent l’étonnement ; plongent le visiteur dans la perplexité ; éveillent son sens de l’humour, l’entraînent dans un schéma ludique et fantasque auquel il ne s’attendait pas !  

     Car le propos de Mireille Faure n’est pas d’être hyperréaliste. Mais de faire intervenir d’abord ses talents de sculptrice en choisissant des terres dont les couleurs brunes et monochromes vont générer l’immédiateté des silhouettes de ses créatures. Et, avec cette sobre excentricité, elle va nous montrer la genèse familiale : l'individu seul, la rencontre et le flirt, les enfants qui naissent, grandissent… Et puis, -signe de contemporanéité d'une artiste témoin de son temps- le conciliabule et le départ de toute la lignée sur un bateau rudimentaire : L'exode, en somme ! 

          Ainsi, la démarche zoomorphique de Mireille Faure a-t-elle généré une sorte d’ethnographie personnelle insolite ! S’il est vrai, comme le pensent les philosophes, que chaque individu possède en lui son propre bestiaire avec son animal de prédilection, voilà l’artiste, perdue dans la multitude de ses créations,  bien décidée à préciser quel est le sien et quel sens il revêt pour elle ! Narrer, montrer, dénoncer… Ainsi avance-t-elle, dans sa facture un peu naïve. Soucieuse de dire. Dire avec cette œuvre éminemment sympathique, qu'il sera agréable et intéressant de suivre.

Jeanine RIVAIS

 

HERVE FOGERON  

 

          Longtemps, Hervé Fogeron a été sculpteur, menant de front deux productions : l'une toute blanche ; et l'autre en couleur. Uniquement pour le plaisir d'aller de l'une à l'autre ; de choisir l'une plutôt que l'autre. Les premiers parce que le blanc était pour lui primordial, qu'en les laissant blancs il avait le sentiment qu'ils étaient entiers, que leur vie connaissait la plénitude. 

          Pour les autres, les sculptures en couleurs, il s'était fixé un "canon" de beauté qui faisait qu'il les rendait belles, laides, blondes ou brunes… protégées ou non par une épaisse couche de vernis selon qu'elles étaient destinées à demeurer intra ou extra muros ! 

Aujourd'hui, le voilà dessinateur. Et il s'attaque aux métiers, chaque artisan présenté comme une photographie et arborant les outils de sa profession : le boulanger sa miche ; le serrurier un pêne etc.  Mais le monde du travail n'est pas le seul sur lequel il a posé sa griffe : les festivités également, comme "Le renne de Noël" tout enguirlandé qui d'un air rigolard se pourlèche les lèvres, à croire qu'il est le cuistot et… imagine-t-on qui est dans la cocotte ? Et puis, inéluctable, voici la mort discutant en toute convivialité avec un confrère, tous deux écrabouillant des crânes humains ! 

Ainsi, s'il a toujours pratiqué l'humour, Hervé Fogeron en est venu à l'humour noir, très noir ! A se demander  si ces dessins  ne sont pas des exutoires lui permettant de conjurer ses obsessions jusque-là contenues ; aller au-delà de lui-même ? Qui sait ? J.R.

VOIR AUSSI : FOGERON HERVE : ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.doc/  Rubrique COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS : Banne 2012.

 

CHRISTIAN FAUCOUIT 

 

          Les œuvres de Christian Faucouit sont essentiellement conçues sur des plaques de cuivre ; chacune étant porteuse d'une sorte de melting-pot dépourvu de perspective et totalement réalisé en des abstractions de riche matière et de couleurs vives qu’il a longuement élaborées, jusqu'à ce que vienne un moment où il estime la scène "équilibrée" et arrête enfin son pinceau ! L’équilibre né du déséquilibre, en somme ! Chaque tableau traité comme un "vrai" timbre-poste géant aux bords dûment piquetés de pointes rigides, peut donc être regardé comme une œuvre à part entière.

          N'était la volonté de l'artiste de ne la considérer que comme une partie d'un tout aligné sur les cimaises, une suite, un ensemble qu'il faut voir comme tel. C'est ce qu'il appelle ses "connexions". 

De sorte qu'au final, la totalité de ces créations n'est qu'un tout, une œuvre première dans sa multiplicité. Et que si l'un de ces éléments est retiré, il reste malgré tout lié de façon indélébile à l'ensemble dont il était précédemment une partie. Et son nouveau possesseur devient maillon de la chaîne formée par l'ensemble des autres possesseurs ; eux-mêmes liés pour toujours à l'artiste.

          Cette évidence complexe à saisir est affirmée avec toute la sérénité, la fermeté et la certitude obsessionnelle de tout collectionneur philatéliste possédant une série complète  ; et Christian Faucouit est à jamais l'artiste d'une œuvre unique !  J.R.

 

JACQUELINE BLANCHET

 

     Est-ce par nostalgie que Jacqueline Blanchet propose ses planches sur lesquelles sont placés des petits carrés porteurs de sardines ; assortiments  qui pourraient figurer à la devanture de quelque vieillotte épicerie de campagne ! ?

         Mais ne choisit-elle pas la partie la plus facile, en ne présentant que des sardines dûment posées sur de jolis papiers exotiques, et en s'évitant le triage, le nettoyage, le décollement des têtes… ? Seule la pêche est parfois évoquée avec ses énormes hameçons autour desquels elle fait un gentil jeu de mots ; ou avec la publicité garantissant la qualité de la marchandise ! Inutile, d'ailleurs, la pub, car à l'œil nu, il est évident que ses sardines sont fraîches, la peau écailleuse ferme et l'œil brillant ! 

      Travail naïf, mais témoignant d'une passion infinie ! Qui mériterait récompense ! Alors, peut-être un jour, le visiteur verra-t-il sur le couvercle d'une boîte, les petites sardines de Jacqueline Blanchet, invitée par une usine de conditionnement. Et bien sûr, une telle boîte deviendra collector ! J.R.

 

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GALERIE ART PLURIEL

 

LOUIS MOLLE 

 

cf MUSEE D'ART ET D'INDUSTRIE

 

VOIR AUSSI :

ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.fr Rubrique Comptes-rendus de festivals Céramiques insolites Saint-Galmier 2006 

 

 

RAPHAËL MALLON 

 

          Quinze ans se sont écoulés depuis que Raphaël Mallon affirmait sa conscience de n'avoir pas trouvé la forme définitive de ses peintures ; de ne pas posséder toutes les clefs pour expliquer sa démarche. Il était déjà, néanmoins, l'auteur d'une création fort curieuse, très intellectualisée, qui posait problème au visiteur à la recherche de son dit ! A laquelle il a continué de donner depuis lors rigueur et passion. Peuplant ses œuvres avec son monde animalo-humain ou humano-animalier, et choisissant des titres qui parfois posent problème, selon qu'ils affermissent la scène  ou sont hors de l'évidence : Par exemple le titre "La mort du torero", corrobore assez bien l'"histoire" : deux bovins à l'arrière-plan, en habits de soie ou velours et chausses brodées, devant lesquels est attroupé un de ces groupes mixtes dont le peintre a le secret, sont autour d'un personnage plutôt petit, étendu sur le sol : mort. Ou encore "Le soleil se lève à loued" où une pseudo-carte de géographie met en scène une population disparate au sud de la Méditerranée. Mais, que se passe-t-il dans "Suivre le rythme" avec cet être assis dos à des montagnes, sa belle barboteuse ornée d'une collerette et couverte de dessins d'autres personnages ? Il n'est pas certain qu'il soit en train de taper sur une  grosse caisse de ses doigts atrophiés. Alors, quel est ce rythme qu'il faudrait suivre ? Qu'est-ce qui a échappé à la perspicacité du visiteur, qui pourrait expliquer ce titre ? 

En somme, la peinture, l'esprit de la peinture de Raphaël Mallon ont-ils vraiment changé au cours de ces années ? Il semble bien que non. Qu'ils sont toujours intellectualisés ; qu'ils se sont affinés, certainement ; que l'artiste domine son œuvre avec peut-être moins de questionnements ? Ses personnages ont peut-être gagné en autonomie, mais ils sont toujours cernés de noir. Où en est-il finalement de ses peintures et collages, lui qui disait en 2006 : "Il y a différentes façons de travailler : dans les 3D, avant de coller, il est possible de bouger les personnages, composer et affiner le propos. Dans la peinture, il est très difficile, une fois sortie l'intentionnalité première, de revenir en arrière. Je ne suis pas pour remettre du blanc et recommencer. Je suis pour le premier trait, celui qui "devait" sortir, etc. Même si certains dessins ou peintures sont complètement réfléchis, s'ils partent d'une idée et vont vers un but, il y a d'autres toiles qui sont totalement instinctives. Et, avec ces instinctives-là, je veux justement arriver à cette dimension, sacrée peut-être, mais où j'aurai en tout cas accentué les matières". Il semble que cette déclaration n'ait pas pris une ride ! 

Et qu'ainsi, Raphaël Mallon continue son cheminement, vivant ses doutes, cherchant ses certitudes et les reconnaissant un moment. "Sans s'arrêter. En équilibre sur ce fil tendu où l'on s'engage sans retour possible. (Son) travail s'arrête. Le (Nôtre) commence". 

Jeanine RIVAIS

VOIR AUSSI : TEXTE DE JEANINE RIVAIS :  "LES CYCLES INFINIS DE RAPHAËL MALLON" : BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA N°71 de JANVIER 2002, Ve FESTIVAL DE PRAZ-SUR-ARLY. 

ET AUSSI ENTRETIEN : WWW.jeaninerivais.fr/PAGES/mallon.htm. 

Et : www.rivaisjeanine.com/festival/retour-sur-banne-2002/mallon-raphael.

Et http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS RETOUR SUR PRAZ-SYR-ARLY 2001.

Et " :  http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS. RETOUR SUR LE PRINTEMPS DES SINGULIERS 2003.

 

CATHERINE URSIN

 

           Depuis combien d'années Catherine Ursin dénonce-t-elle la violence dans ses œuvres ? Déjà, au début du XXIe siècle, alors qu'elle "travaillait du bidon", elle "attaquait" le métal avec une misérable petite machine sur laquelle il lui fallait s'échiner, avec le sentiment que ses dents à elle travailleraient mieux que l'outil. De cette confrontation humaine et mécanique, surgissaient des personnages en des positions gymniques inattendues, érotiques souvent, relevant du combat parfois… Et dès lors, peut-être mal dans sa peau, elle déclarait : "Lorsqu’il s’agit de relations sexuelles, sait-on jamais s’il s’agit de lutte ou d’amour ? J’aime cette ambivalence entre difficulté sexuelle et embarras à gérer une difficulté matérielle. Il est vrai qu’elle est née de l’aspect négatif de ce travail. De la dureté du matériau. De la difficulté à le découper. Ce qui m’amuse, c’est justement de créer cette ambiguïté à partir de ces problèmes…"

          S'amuser, peut-être ! Mais il était aussi question de souffrance, d'enfermement… Et les années qui suivirent justifièrent plus que largement cette quête obsessionnelle visant à dénoncer les maltraitances de tous ordres qui peuvent être infligées aux êtres vivants, les femmes en particulier. Et se sont alors succédées des œuvres de papier ou de métal, montrant des coïts diaboliques, des affrontements érotiques, des scènes horrifiantes, un monde à la fois gore, mais attachant de couples crachant feu et sang, de femmes brûlées, saccagées, hurlant sur l'immensité de la toile neutre, renvoyant au visiteur à la fois attiré et effaré ,des images d'intenses douleurs. "Toutes mes recherches de plasticienne ", dit-elle, "abordent la violence, quelle qu’en soit l’origine (guerre, viol, maladie atavique ou tellurique…), et ses conséquences physiques, morales, intérieures, extérieures, visibles ou invisibles sur l’être humain. La destruction, les blessures, la douleur comme point de départ de réflexion pour atteindre la reconstruction, la réparation et la force de la vie, transcrites sur des surfaces rouillées de tôle, de photographies abîmées, d’installations brûlées, de papiers tachés… là où le temps a imprégné sa trace…"

      Finalement, ce visiteur, vivant profondément cette situation d'attraction / répulsion, face à ces délires insoutenables, s'interroge sur les raisons de mal-être personnel ou d'empathie exacerbée à l'égard du monde,  qui ont amené Catherine Ursin à ce stade de création où toutes les définitions deviennent impropres. Où les seules comparaisons possibles seraient avec l’univers kafkaïen qui fait de l’angoisse l’expérience fondamentale de l’homme. Ou bien avec ses prédécesseurs, les Expressionnistes dont elle rejoint le besoin d’épancher une subjectivité marquée par le sentiment de la souffrance et du tragique ; en un style basé sur un maximum de force expressive... Et il réalise qu'en tout cas, il est encore bien loin, le temps –y parviendra-t-elle jamais ? et finalement est-ce son propos ; car cette souffrance de ses créatures ne soulage-t-elle pas la sienne propre ?- où elle pourra contempler un authentique "humain" né de ses mains, de son esprit enfin libéré, et de son cœur si puissamment investi ! Et, sans risquer de mourir, poser scies et pinceaux !

Jeanine RIVAIS

VOIR AUSSI : ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique RETOUR SUR LE PRINTEMPS DES SINGULIERS 200. 

 ET : http://jeaninerivais.fr  COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS: "COURANTS D'ARTS" NOTTONVILLE 2007.

 

JOEL CRESPIN 

 

Sans doute, s'il avait été metteur en scène de théâtre, Joël Crespin aurait-il exigé de ses architectes, des décors pleins de mouvement. Car, le mouvement est ce qui caractérise avant tout ses œuvres ; de sorte que, même immobile et bras croisés son personnage à la chéchia a l'air de déchirer un papier ; même couché son tigre semble en train de rugir à perdre haleine ; son monstre accroupi, être prêt à bondir ; etc. 

Peut-être cette impression est-elle due au fait que chacun, humain ou animal a l'air de promener son double ; soit par un ou deux cernes l'entourant totalement ; soit par un personnage collé à lui ou silhouetté le chevauchant…

        Mais l'artiste possède également un grand sens de la couleur ; il est même un coloriste-né, capable de conjoindre les couleurs complémentaires, certes, mais les plus opposées, sans que survienne le moindre hiatus. Cette harmonie est d'ailleurs renforcée du fait du pointillisme obsessionnel dont il est l'habitué ; et puis, ici un petit pli, mine de rien ; là un enchevêtrement de minuscules taches informelles…

Enfin, depuis toutes ces années où il révèle sa capacité à imaginer, Joël Crespin fait montre d'une absolue liberté : ainsi se succèdent sur ses toiles, perversité et provocation, caresses et copulations, immédiatement rattrapées par l'humour dont sont empreintes toutes ses œuvres et qui en supprime toute brutalité. 

Et même s'il semble, au fil des années, avoir renoncé aux reliefs très accusés qui créaient la surprise, pour revenir presque en deux dimensions, il reste un artiste surprenant et talentueux.

Jeanine RIVAIS

VOIR AUSSI : CRESPIN JOËL : TEXTE DE JEANINE RIVAIS : COUTURES ET FANTASMES TISSUS D’HUMOUR NOIR, chez JOEL CRESPIN, peintre" : N° 58 de septembre 1996 du DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA.

Et LA CRITIQUE PARISIENNE N° 32 DE JUIN 1997.

VOIR AUSSI : "CINQ QUESTIONS A…" : BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA N° 75 Tome 1 d'AVRIL 2004. 

Et http://jeaninerivais.jimdo.com/ Rubrique FESTIVALS : RETOUR SUR PRAZ-SUR-ARLY 2003.

Et TEXTE DE JEANINE RIVAIS  : http://jeaninerivais.jimdo.com/ RUBRIQUE FESTIVALS RETOUR SUR BANNE 2003.

Et ENTRETIEN AVEC JEANINE RIVAIS : http://jeaninerivais.fr Rubrique COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS : NOTTONVILLE 2007. 

 

PHILIPPE BUIL

 

          Les œuvres de Philippe Buil, des bustes pour la plupart, mais aussi parfois, des têtes, des objets pouvant décorer quelque luxueux intérieur, relèvent plus de l'artisanat d'Art, de la technique pure, que de la psychologie de l'Art singulier. 

Une technique où il utilise bois, verre, mais surtout bronze. Qu'il a imaginée et peaufinée dans le secret de son atelier, et qui fait de ses réalisations de véritables dentelles de métal.

           Bien sûr, il possède la panoplie du parfait ferblantier ! Mais surtout, il se sert d'un chalumeau qui, fonctionnant grâce à un générateur d'hydrogène, chauffe le métal jusqu'à 8000 degrés Celsius et lui permet de le découper avec le maximum de précision. Ainsi peut-il reproduire avec ses matériaux, des moulages de corps réalisés auparavant. Formant un lit de sable sur  lequel du métal fondu tombant goutte à goutte génère cette belle texture. 

          Technique qui n'appartient qu'à lui, dont il peut varier à l'infini les couleurs en changeant le métal ou en ajoutant des pigments, et les patines en frottant à son gré le résultat obtenu  ; chaque œuvre étant ainsi  une pièce unique !  J.R.

 

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ATELIER PHILIPPE DURAND

JEAN-CLAUDE BIDOT

 

          Ne posez même pas la question, elles sont toutes ce que l'on définirait aujourd'hui "Collectors" ! Qui, elles ? Mais toutes les vieilles guimbardes de Jean-Claude Bidot, bien sûr ! De quand peuvent-elles dater ? A en juger par certaines cabines à angles droits, sans souci de la prise au vent, rafistolées et de traviole, et par les réservoirs à claire-voie, elles doivent remonter au début du XXe siècle ? Peut-être un peu avant pour certaines, milieu du siècle pour d'autres ! Tout cela en parfait état de marche (qu'importe à quelle vitesse elles peuvent rouler ! ), dûment repeint à neuf comme cette Dodoche  verte ou cette camionnette marron !

          Pourtant, à en juger par la mine patibulaire de certains chauffeurs avec leurs feutres rabattus sur les yeux, qui poussent leur véhicule à fond, il se pourrait bien que certaines ne soient même pas tout à fait légales, en tout cas légalement utilisées ! Mais, qu'importe, pour montrer à quel point tous ces véhicules lui sont chers, il les charge d'affichettes portant messages. Des messages d'amour souvent (on semble aimer beaucoup chez Jean-Claude Bidot) : "Bidot (le voilà qui parle de lui-même à la troisième personne !) connaît l'amour et l'Art et les autos, les bateaux et même Thierry Pinet !!" (Connaisse qui peut Thierry Pinet ? ). Il inscrit même sur le camion de l'entreprise Bidot : "les femmes ont des raisons de m'aimer plus". Et puis, des messages hautement philosophiques : "Vivre, c'est trop sérieux, c'est comme essayer d'aimer" ; "Il est des êtres dont l'envie est de retenir la nuit". Enfin, des messages descripitivo/poético/amicaux : "Splendide barque de bois qui emporte sur le flot paisible l'amour mérité d'Antoine et Fabienne".

          Parfois, il s'amuse, plaçant un cavalier et son cheval parallèlement mais de l'autre côté de la voiture ; jouant alors sur la perspective de façon à faire croire qu'il s'agit d'une hippomobile, surtout avec les quatre pieds de l'animal qui semblent sortir du tapis de sol de la voiture ! 

D'autres fois, il fait des infidélités à ses chères automobiles ! Il s'en va sur une barque vendre ses cochons de l'autre côté de l'océan ; ou sur un bateau à vapeur, sans doute à la "pêche au gros", vu les lignes qui sont tendues à la proue et à la poupe du bateau. En tout cas, il s'en va faire la fête dans quelque cabaret où se trémousse un guitariste endiablé! 

 

Toute cette flotte de véhicules composés d'éléments issus peut-être des décharges où il a fouiné ; souvent dessinés, pyrogravés… pour mettre en évidence la beauté de tous ces objets patrimoniaux ; Créer, en somme,  une poésie personnelle qui ressemble fort à un défi ! Qui est tout à fait jubilatoire.! 

          Oeuvre qui offre au spectateur une évidence : A l’âge où il est de bon ton d’être gourmé, d’avoir l’air compassé qui sied aux adultes, Jean-Claude Bidot a trouvé ses jouets ; des jouets qui, pour être réalisés, ont exigé talent et initiative. Mais, d’après le résultat, il s’en amuse de tout son cœur : C’est que jouer dans son cas, est une affaire sérieuse, n’est-ce pas ?

Jeanine RIVAIS

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LES LIMBES CEPHALOPODE

 

LEONORA BISAGNO

 

L'exposition n'étant pas encore installée, seules deux photographies figuraient sur un pilier de la galerie, laissant penser que la photographe a pour principe de travailler sur le flou.

 

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LES MOYENS DU BORD

ANNE LORDEY

ARTISTE DE RUES

 

Est-ce parce qu'elle travaille généralement dans les rues, voyant passer des foules souvent compactes dont elle ne peut suivre qu'une fraction, qu'Anne Lordey peint des amoncellements de gens et d'animaux, serrés, souvent de guingois, littéralement emboîtés les uns dans les autres, circonscrits dans un rectangle non figuré autour duquel s'étale une large marge blanche  ? 

Tout se passe comme si, ces amas de populations soudain arrêtés, le lent travelling d'une caméra balayait doucement cet agglomérat ! Là s’arrête l’imaginaire, commence la "circumnavigation" raisonnée. Car ce qui frappe, dans le travail de l’artiste, c’est la rigueur architecturale de l’exécution, la précision entomologique des enchevêtrements de strictes géographies, silhouettes humanoïdes ou animales, arabesques idéalement réglées comme des chorégraphies. 

Tout cela en noir et blanc, avec parfois, exceptionnellement une pointe de rouge ou de bleu pour poncturer certains espaces. Ce sont les seules “fantaisies” de ce monde figé ; les évocations dans lesquelles l'être humain est présent de manière étrange, engoncé dans l'être suivant, perdu, vulnérable, mais multiple. Compressant les limites de chaque anatomie à la dimension de son environnement, l'artiste génère ainsi des scènes au caractère insolite. Obligeant le regardeur à se fixer des points de personnalisation, afin de se repérer dans cet univers qui, à force d’être anonyme, devient fascinant pour l’œil impatient d’y détecter le plus petit signe de vie, la plus petite faille où il pourrait s’agripper ! Ici un petit lac sur lequel vogue une nef minuscule ; ailleurs, une main émergeant, toute droite, du magma ambiant ; ailleurs encore, une tête de poisson, à l'œil vif, etc. 

Enfin, vient le moment de la surprise : en observant chaque œuvre, le visiteur réalise que tous ces petits êtres sont installés de telle sorte qu'ils sont inclus dans une grande figure ; énorme tête difficile à canaliser, n'étaient têtes et bustes qui cascadent formant la chevelure/poissons d'un côté, /poupées de l'autre. Ou bien ce sont deux gros yeux perçants qui suggèrent la tête. Ou carrément, c'est un petit baigneur assis au sol, jambes raides, qui semble attirer vers lui les foules évoquées plus haut. 

       Et puis, autour de ces "rectangles" virtuels, la dessinatrice garde toujours, -comme il est fréquent en poésie-, de grandes marges blanches. Marges de silence dont la principale qualité est non pas d’évoquer, mais d’inspirer. Respirer après l'exploration de ces plages fourmillantes ! 

 

Une œuvre bien singulière, finalement : où le visiteur s’interroge sur les motivations qui poussent une artiste dont la définition devrait être chaos primal, folie créatrice, à dispenser son incontestable talent en une réalisation de froide logique. Peut-être trop raisonnée dans sa volonté de dire, témoigner, dénoncer, pour être bouleversante. Mais puissante, tout de même ; attachante par ses moments de poésie ; son besoin irrépressible de tenter de faire bouger ce qui est apparemment ses paysages intérieurs.

Jeanine RIVAIS