PRAZ SUR ARLY : FESTIVAL 2003

UNE MANIFESTATION ARTISTIQUE, UN COUPLE FONDATEUR, UNE CONVIVIALITE

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CINQ QUESTIONS A ANNE-MARIE JOUOT

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         Jeanine Rivais : Depuis quand peignez-vous ? Et quel a été votre itinéraire, pour en venir à la forme actuelle de votre création ?

          Anne-Marie Jouot : Je dessine depuis l’âge de 15 ans, et j’ai toujours eu besoin de dessiner. J’aimais à cet âge-là Modigliani et Renoir, et je reproduisais leurs tableaux.  J’ai commencé par le noir et blanc. Plus tard, j’ai établi ma création avec d’autres supports : des tricots assez excentriques, des tissus, des collages… Bien sûr, quand je réalisais ces choses, autour de la trentaine, j’ignorais complètement que c’étaient des choses qui pouvaient se montrer. Je les faisais pour moi et pour ma fille. 

          Un jour, j’ai découvert l’Art-thérapie, et le moyen qu’elle offre de s’exprimer très librement. Je pensais que pour être artiste, il fallait impérativement avoir fréquenté une école d’art. Cette découverte a donc été pour moi quelque chose de merveilleux. Pouvoir trouver mon langage, dire ce que j’avais à dire. Parce que j’avais beaucoup de choses à dire ! 

          J’ai beaucoup travaillé avant d’avoir le regard de quelqu’un qui me dise : « Il faut montrer » ! J’avais alors plus de quarante ans.

 

          J. R. : Au moment où vous êtes passée à la couleur, et pris la décision de peindre, était-ce déjà les formes que vous montez maintenant ?

          A-M. J. : Depuis plus de dix ans, je travaille pendant au moins trois heures par jour, il y a bien sûr une évolution. Je suis passée de dessins très confus à des choses plus établies, à des choses plus construites. Peu à peu, j’ai trouvé, en passant d’un support à l’autre,  MA technique. Avec la conscience que ce n’est pas terminé, que je dois continuer à chercher.

 

          J. R. : Quelle définition donnez-vous de votre travail ?

         A-M. J. : C’est difficile de répondre ! Mon travail, c’est beaucoup de couleurs. Comme je l’ai dit, je suis partie du noir pour venir progressivement à la couleur. Et, désormais, c’est elle qui me donne le chemin à prendre. La couleur, ce sont des émotions, mon histoire. J’ai toujours beaucoup de personnages, et parmi eux, il y en a toujours un qui est vrai, que j’ai rencontré, qui a de l’importance. Par exemple, celui où j’ai peint un zèbre. Ce zèbre est à l’origine d’une belle rencontre. Autour de lui, va se construire une histoire. Chaque tableau est fait d’allers-retours, de choses que l’on ajoute, d’autres que l’on barre. Un tableau, c’est comme un ami. Au départ, lorsqu’on rencontre quelqu’un, on ne lui dit pas tout, et puis petit à petit, s’établit une relation. C’est la même chose dans un tableau. La toile est blanche, toute propre, anonyme. Sur ce support, je commence à poser tantôt des collages, tantôt de la peinture… Un lien va s’établir avec la toile. Au fur et à mesure, je vais lui « dire » de multiples choses, comme à une amie qui gagne en intimité. Jusqu’au moment, où ce n’est plus l’amie, c’est moi. 

          J. R. : Quelle définition donnez-vous de l’Art singulier ?

         A-M. J. : Pour moi, je pense que chaque artiste qui est ici prouve au public, que tous nous avons droit à un langage, le droit de nous exprimer ; mais qu’il faut aller chercher au fond de nous-même. Qu’il nous faut être sincères. Il y a, dans cet Art hors-les-normes, cette notion d’authenticité. Je crois que chacun de ces visiteurs, va trouver sur notre toile, un fragment de son histoire. Et même s’il y a des rejets, il se sera néanmoins passé quelque chose, et ils ne partiront pas les mains vides. 

       L’Art singulier, c’est le droit à la différence, l’ouverture à la tolérance. Je crois que notre travail ne consiste pas seulement à vendre des tableaux. Il consiste aussi à établir ces valeurs. Dire aux gens qu’à travers nos travaux qui sont différents, leur regard va changer, quelque chose va se passer, et peut-être prendrons-nous le chemin vers un monde meilleur.

 

J. R. : Vous voilà depuis dix jours à Praz-sur-Arly : Quelle définition donnez-vous de son Festival?

A-M. J. : Ce festival, c’est la rencontre avant tout, et c’est énormément de chaleur humaine. C’est aussi un festival de qualité, à travers les œuvres qui sont montrées. Mais personnellement, c’est la rencontre, ce que chaque personne m’a donné au travers de son être profond, et au travers de son travail. Ces moments uniques qui se passent dans une journée, et qui nous laissent de jolies traces de vie.

 

       J. R. : Quelqu’un a écrit que la création artistique est une mise en forme de sa douleur. Votre création est-elle conforme à cette définition ? Ou bien, n’est-elle, au contraire, que pur plaisir ?

      A-M. J. : Oui, tout à fait. Cette définition me convient tout à fait. Mais, au cours de toutes ces années de travail, j’en ai fait quelque chose de positif. Il y a toujours, pendant mes heures de travail, je la retrouve. Mais je la transforme, je la transcende, elle devient quelque chose de beau, de l’amour pour la vie.

 

J. R. : Quels sont vos projets ?

A-M. J. : Etre, continuer d’être dans la recherche. Ne pas me contenter d’assister à certains festivals, certaines expositions… Me remettre en cause sans arrêt, avancer …

 

      Entretien réalisé le 28 juillet 2003.

 

 

JOUOT ANNE-MARIE : VOIR TEXTE DE JEANINE RIVAIS : " DES LARMES AU RIRE, LE CHAMBOULE-TOUT D'ANNE-MARIE JOUOT peintre et sculpteur". N° 63 d'octobre 1998. Et  du N° 72 Tome 2 du BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA. 

Et TEXTE : jeaninerivais.fr, Rubrique ART SNGULIER. 

Et aussi : www.rivaisjeanine.com/retour-sur-le-printemps-des-singuliers.../jouot-anne-marie/ et BANNE 2002.  

Et ENTRETIEN (http://jeaninerivais.fr Rubrique COMPTES-RENDUS DE FESTIVALS Rubrique CERAMIQUES INSOLITES SAINT-GALMIER 2006.