Alfredo Bryce-Echenique est d’origine péruvienne. 

          Pour comprendre certaines allusions du livre, un certain état d’esprit, il est bon de savoir que le Pérou est peuplé de deux sociétés juxtaposées : Les Blancs et les Indiens ; aux intérêts divergents, au point que s’exerce entre elles, un racisme d’une ampleur rarement égalée dans les autres pays d’Amérique latine. 

          Dans son ouvrage "Amérique latine et langues régionales", Pierre Declercq explique : "…Au Pérou, coexistent deux sociétés numériquement comparables –dix millions d’habitants chacune".

          Ceci a pour conséquence un racisme féroce : "Toledo, Le candidat à la Présidence, n’a pas été élu parce qu’il est indien. Il s’est gagné le sobriquet insultant de "Choledo" (cholo étant un mot extrêmement péjoratif pour dire Indien). Par contre, le pays a élu pour la troisième fois un Japonais qui parle espagnol comme Jane Birkin parle français… qui se trompe sur le genre des mots ; ne différencie guère les "l" des "r", et a toute sa fortune au Japon. A ceci, s’ajoute la fraude électorale, beaucoup de gens ne pouvant concevoir de voir élire un candidat perçu comme un "igualado" (terme pouvant être approximativement traduit par "un égalé", c’est-à-dire un non-blanc qui a le toupet de se prendre pour un blanc).(fin de citation) Pour résumer cette situation, l’écrivain cite une maxime très connue au Pérou, du poète César Vallejo, et qui dit : "Donne du pouvoir aux Indiens, et ils te foutront la merde". 

On peut donc imaginer que s’applique à des milliers de gens, des jeunes en particulier, la phrase d’un autre écrivain, Julio Cortazar, lui-même émigré à Paris, et dite à Mario Vargas Llosa : "N’être personne dans un lieu qui est tout, est mille fois préférable à l’inverse".

 

Qui est Alfredo Bryce Echenique ? 

 

          Il naît à Lima, en 1939. Il est fils de banquier, petit-fils de Président de la République et descendant du dernier Vice-roi du Pérou. Et, apparemment, d’après son nom, descendant des premiers Basques émigrés au Pérou.

          Il fait ses études primaires et secondaires dans des établissements dirigés par des Nord-américains ou des Anglais. Il obtient les titres d’avocat et de docteur es lettres à l’université nationale de San Marcos.

En 1964, il choisit de s’exiler en Europe. Il réside en France, Italie, Grèce et Allemagne. 

Il reste une vingtaine d’années en France et enseigne dans les universités de Nanterre, Vincennes et Montpellier. 

De 1984 à 1999, il vit à Madrid, puis retourne au Pérou. 

Revenu en Europe, il vit actuellement à Barcelone. 

Bryce-Echenique est l’un des écrivains latino-américains les plus traduits en Europe. Il a reçu plusieurs prix littéraires pour certains des romans qui ont jalonné son itinéraire.

 

Sa bibliographie est abondante, au long de laquelle deux ouvrages semblent se détacher :

*** "Julius" : qui fut son premier roman et obtint en 1973, le Prix du meilleur Livre étranger.

 L’histoire se déroule à Lima. Julius est né dans un palais et passe sa petite enfance dans le carrosse de son grand-père. Sur sa table de chevet est posée la photo de sa sœur Cinthia dont il a oublié la présence réelle et qu’il ne connaît plus qu’à travers cette image qui le fascine. Plus tard, il s’éloignera peu à peu de cette photographie, et commencera à vivre par lui-même. Cet ouvrage dépeint donc une lente prise de conscience de soi, par un petit garçon trop seul ; de sa solitude face à une sœur disparue ;  et qui aura bien du mal à vaincre cette épreuve. Ce récit et le langage qui le porte, s’organisent autour des nécessités enfantines d’un petit garçon de sept ans souvent tenté de se réfugier dans le merveilleux, et de son difficile passage à l’adolescence.

*** Vingt ans après, il y eut "Noctambulisme aggravé", ou l’histoire de Max Gutierrez, professeur péruvien de littérature, émigré en France, et lecteur gargantuesque de Rabelais. Totalement insomniaque à la suite d’amours malheureuses, il erre chaque nuit à travers les villes où il réside. Pérégrinations qu’il raconte de son lit dans une clinique psychiatrique ;  et dont il est impossible de déterminer si elles relèvent de la fiction ou de la réalité ? 

          Un ouvrage épique, ironique à la limite du burlesque ; généreux ; à l’évidence largement autobiographique. Aventure amoureuse et dérive hallucinée et hallucinante d’un être privé de sommeil ; et dont les heures d’insomnie sont consacrées à l’amour, la sensualité exacerbée, perpétuels allers-retours entre des moments de bonheur absolu et des heures de noirs cauchemars. 

 

          Le dernier ouvrage d’Alfredo Bryce-Echenique, "Guide triste de Paris", que nous évoquons ce soir, est un livre de nouvelles. Car, dit-il, "après plusieurs romans, je me sentais tout entier rempli de la nostalgie de ce genre diabolique qu’est la nouvelle". Il ne faut guère s’étonner de ce mélange des genres, car ce touche-à-tout, en effet, "baigne dans la fiction imaginative", et il lui est impensable d’être catalogué dans l’un de ces genres, plutôt que dans l’autre. Ou d’être dans l’un sans être en même temps, un peu dans l’autre.

 

Quelle est la composition de ce livre ? 

 

          Cet ouvrage est une suite composite de quatorze nouvelles : six publiées "comme chroniques de voyage ou journalistiques", dans lesquelles "l’imagination finit manifestement par faire des siennes et par donner un poids fondamentalement littéraire à ce qui devait être (à l’origine) du journalisme". Il a, pourtant, dans ces six nouvelles, supprimé quantités d’éléments littéraires "parce que cela aidait beaucoup à ce que l’idée de guide gagne en vraisemblance. Parce que" (ajoute-t-il), "s’il existe à Paris, des guides pratiques, bons ou mauvais, il n’existe pas, que je sache, de guides tristes et encore moins de Paris ". 

          La nouvelle intitulée "La plus belle mort de mai 1968" c’est-à-dire pour cet amoureux de westerns, celle de Richard Widmark, a été écrite pour figurer dans un livre-hommage à cent ans de cinéma espagnol.

"Et les sept autres nouvelles n’ont d’autre histoire que celle de leur propre écriture". 

 

           14 nouvelles constituent donc ce "Guide triste de Paris". Paris à propos duquel, l’auteur cite en exergue une phrase de Nicolas de Chamfort (¹) : "Paris, ville d’amusements, de plaisirs, etc., où les quatre cinquièmes des habitants meurent de chagrin". 14 nouvelles écrites à partir de ce scénario terriblement pessimiste ; au cours desquelles, Alfredo Bryce-Echenique trace une magnifique galerie de portraits, un inventaire un peu désabusé des heurs et malheurs de ces jeunes exilés latino-américains, attirés par "La Ville Lumière" . Et, dans le même temps, rédige une sorte de manuel/avertissement de survie pour matamores débarquant bien décidés à conquérir cette ville ; et d’une façon générale, pour étrangers trop téméraires ou trop innocents, confrontés aux aléas de la vie en France.

 

          14 nouvelles, mais finalement une seule histoire protéiforme, dont on peut affirmer qu’elle est grandement autobiographique, car chaque fois l’auteur y dit "je", comme s’il était aussi bien l’ami de l’amant de Claire menant la vie de château, que l’écrivain avec chat noir, ou l’amateur de cinéma privé de ses westerns et de ses héros pour cause de "militantisme à gauche", etc.  

          L’histoire, les histoires parallèles ou entrecroisées, d’une joyeuse bande d’étudiants, de boursiers "à vie" et d’attachés culturels invités de la France, "Latino-américains tous de gauche. Jusqu’à ceux de droite en vacances qui l’étaient". Débarquant à la fin des années 60, dans le Paris de Truffaut, de la Sorbonne en ébullition, des ponts de la Seine témoins de tant d’amours brèves, de la terrasse du Flore où venaient encore parfois Sartre et Simone de Beauvoir ; des gens frais émoulus de leur Pérou, prêts à participer à la "fête" dans cette ville faite, dans leur esprit, pour aimer, pour rire, se livrer à d’interminables beuveries, danser entre amis "des tonderos, des marineras et de tristes tangos"… Bref, une saga de personnages tous hors normes, marginaux, artistes, vagabonds dans l’âme.

 

          14 nouvelles dans lesquelles Alfredo Bryce-Echenique emploie, pour rendre vivants ses protagonistes, tous les procédés traditionnels du rire et avant tout, celui de faire rire par sa peinture attentive des mentalités et des milieux ; par ses récits galants et quelquefois gaillards ; un comique franc, direct, ou au contraire compliqué parce que chargé d’intentions diverses. 

          On y trouve tour à tour le grossissement, comme ce cornélien dilemme de l’écrivain incapable d’écrire un livre, et obligé de choisir entre sa femme et son horrible chat noir…ou comme ce jeune homme qui ne peut s’empêcher de dépenser avec des manières de grand seigneur ses deux éphémères fortunes, celle qu’il trouve dans la rue, puis celle qu’il gagne au casino… ou encore la description circonstanciée et féroce de ce que sont "Nos chères concierges de chaque jour", etc. Puis viennent la grossièreté volontaire, les expressions triviales comme les développements sur les crottes de chiens à Paris ; ou populaires : le mot "cholo" évoqué plus haut revient souvent, de façon plus familière que méprisante d’ailleurs. L’auteur assène des vérités évidentes du genre "Il est mauvais de croire à outrance à une idée, surtout quand on n’en a qu’une". Il se livre à la fantaisie la plus débridée, tel le séjour linguistique en Allemagne d’Ojeda, le noir si noir "qu’on appelle un moricaud, et en plus il est péruvien, ça alors ce n’est pas supportable" et qui, un demi-siècle plus tard, devenu un vieillard, rit encore en repensant aux réactions réelles ou imaginaires de son hôte d’alors, Herr Hertwig. Se succèdent des digressions, des coq-à-l’âne, d’invraisemblables néologismes comme ce rictus aryo-acide, des divagations parfois si longues ou si répétées, que le lecteur y perd son… péruvien : lui qui attendait un enchaînement logique dans la démonstration se retrouve face à un système d’incohérence du genre "Tu ne sais pas ce que c’est que le Musée du Louvre… Mince, depuis le temps que vous êtes employées dans des familles fortunées. Bon, oui,  je travaille avec un artiste…, etc. etc." ! L’auteur fait régner en maître le style bouffon, les calembours, l’esprit estudiantin, avec des blagues impitoyables de potaches comme celle qui consiste à surnommer Dona Enriqueta Taboada y Manso de Velasco, la Grosse Queta … Il multiplie les énumérations, les effets de pastiche grandiloquents comme cette phrase : "Ressentant et fredonnant la fierté et le bonheur d’être péruvien, d’être né dans ce beau pays du soleil, où l’Inca indompté, préférant la mort, légua à ma race le grand héritage de son courage, et avec le meilleur esprit de footballeur péruvien revêtu du maillot national dans un stade étranger, Remigio Gonzalez enduisit sa voix de miel d’abeille et de nectar des dieux et se présenta…". Ces procédés se retrouvent, à des degrés divers, dans toutes les nouvelles.

          Parfois, plus modéré, Alfredo Bryce-Echenique préfère le sourire doux-amer comme dans "Bonne et heureuse année à vous, Parodi", lequel retrouve après trente ans, son unique amour, devenue une infâme ivrognesse mais pour laquelle il a gardé ses yeux d’adolescent. D’autres fois, il choisit l’humour corrosif de "La grosse et un  maigre" où Riqueta (déjà évoquée) méprise si fort son mari qu’il s’enfuit avec leurs deux fils, et qu’elle se retrouve complètement dépouillée. Devenue attachée culturelle du Pérou à Paris, elle ouvre largement sa maison aux jeunes étudiants. Or, à chaque réunion dansante du samedi, un voisin tape au plafond à 22 heures précises et appelle la police ; jusqu’au jour où les étudiants l’invitent, et pensent l’avoir amadoué, puisqu’il les quitte en affirmant ne pas se souvenir d’"avoir passé de samedi aussi heureux de toute sa vie ", ce qui ne l’empêche pas, à 22 heures… etc. Ou encore, l’écrivain abonde dans le tragi-comique de "Paris canaille", où la pauvre Rosita déneige ce qu’elle croit être "sa" voiture, encouragée par le sourire d’un caballero, lequel devient bientôt franchement grossier. Et c’est alors qu’elle s’aperçoit qu’elle s’est trompée de voiture et s’effondre dans la neige, plus qu’à demi-morte. 

 

          "Paris canaille" semble d’ailleurs être une charnière dans ce "Guide triste de Paris". Celle où l’auteur ne craint pas de laisser parler son cœur et développe longuement son amitié pour une vieille dame née dans la plus noble des familles péruviennes, et dont la vie a basculé un demi-siècle plus tôt, lorsqu’elle a fait remarquer à son père que "Pérez Prado" (particule de son nom côté maternel) était aussi le nom de l’inventeur du mambo. Reniée par ce père obtus elle devient dame de compagnie chez une cousine et lorsque celle-ci repart après plusieurs années passées à Paris, Rosita choisit de rester. Elle saura se rendre indispensable à l’Ambassade. Et Bryce-Echenique s’en donne à cœur joie, décrivant leurs beuveries, pontifiant, suggérant, s’étonnant… Jusqu’au jour où elle tombe dans la neige et où "toute l’Ambassade et un million d’amis" l’accompagnent au cimetière. 

          L’auteur qui, jusqu’alors, avait considéré Paris avec une certaine complaisance et une grande complicité se révolte carrément, et s’écrie : "Il n’y a que toi pour être aussi méchante, maudite ville… Parce que c’est aujourd’hui, précisément, que Rosita fêtait ses noces d’argent ici, et dans un mois ses soixante-seize ans… Nous étions en train de lui organiser la plus belle des surprises et moi je devais dépenser mon salaire d’un mois entier pour l’inviter chez Maxim’s… Oui, il a fallu que ce soit toi, Paris canaille…"

 

          Finalement, malgré tous les trésors de comique déployés par l’auteur, les avatars et le poids de la vie sont tels qu’à aucun moment nul n’a envie de rire à gorge déployée. Le lecteur s’émeut parfois, comme dans la triste aventure de "Gato Antunez…" qui finit par se suicider. Tout de même, il sourit souvent. Mais force lui est de constater que toutes ces nouvelles sont des histoires de ratés. Qui ont quitté leur pays pour trouver "à Paris" la panacée. Mais s’aperçoivent bien vite que cet "ailleurs" rêvé comme si radieux, n’est pas pour eux meilleur que la vie dans leur pays. Au contraire. 

Et, ce lecteur qui, hormis leurs frasques, n’apprend pratiquement rien de leur vie au quotidien, sauf l’inconfort des chambres de bonnes avec cabinets à l’extérieur, la détestable qualité de la nourriture des restaus U, le martyr enduré du fait des concierges, et quelques autres détails, se trouve face à une autre évidence : Aucun des personnages de Bryce-Echenique n’aura "vécu" à Paris. Peut-être certains se seront-ils fait "une injection de déjobardisation". Mais, à part "la pauvre Rosita" qui meurt là où elle l’a voulu, tous repartent chez eux, paumés, définitivement marginalisés. Tel est le cas des "machos caducs et lamentables" comme Remigo Gonzalez arrivé avec, pour tout viatique, les conseils sexuello-racistes de son père : "Au fond de son âme, une petite Française n’est jamais qu’une petite p…". Parti pour "un million de conquêtes amoureuses…", le jeune homme, chaque fois débouté restreint de plus en plus le champ de ses prétentions pour en venir aux Maghrébines et finir avec des… Péruviennes. Et, lorsque, désabusé, il rentre dans son pays, "sans savoir absolument rien de Paris", il devient "si rapidement chauve que, en lui parlant vraiment d’homme à homme, son père lui demande si par hasard, il (n’a) pas survécu de justesse à une gonorrhée… ?"… 

          Il faudrait citer encore le cas des deux compères "quichottesques", Indiens d’une laideur absolue, usurpant, pour payer leur ardoise dans un bistrot, les rôles de deux terroristes internationaux, et projetant le  pseudo-"assassinat hors de prix de Domingo Peron". Evoquer un amour éternel qui ne sera jamais concrétisé dans "Deep in a dream for you" ou dans "Lola Beltran in concert". Rappeler le cas de Vérita qui emmène sur sa moto les mariées, épouses de ses amis pour être prêt lorsque adviendra pour lui le grand amour, lequel se soldera, bien sûr, par un échec. Dire l’ambition utopique de Parodi, peintre en bâtiment qui voudrait être Van Gogh ; celle de l’écrivain manqué qui ne rend service qu’à ceux qui lui sont supérieurs. Regretter la cruauté de Mario qui profite de l’amnésie dont souffre sa propriétaire pour ne jamais payer son loyer. S’attendrir sur la fin du vieillard tellement plus que centenaire qu’il est presque le doyen du monde ; et qui agonise à l’hôpital en ressassant ses amours et ses cours d’allemand d’antan.

 

          Finalement, sous ses dehors bonhomme et rigolard, ce "guide" qui traverse non pas Paris, mais des vies qui se sont accrochées à cette ville, est effectivement un peu triste. De ce fait, le titre, par le décalage de l’adjectif "triste" apparaît comme un jeu de mots pince-sans-rire, un pied de nez à l’adresse du lecteur. Et l’ouvrage entier, constat amer plutôt que "guide", s’écoule comme une grande vague véhiculant un humour noir des gens désespérés, au sommet de laquelle l’écrivain se joue de la réalité, de la fiction, de la mythomanie et des monomanies de ses personnages que seuls protègent l’humour, l’autodérision et un sens aigu de la liberté.

 

          Trente ans après son premier ouvrage, alors que l’auteur "a suffisamment vécu et écrit pour savoir que dans tout ce qu’il fait ou ne fait pas, éveillé ou endormi, il y a au moins un élément hautement littéraire…", cette littérature baroque, avec son style prolifique, torrentiel même du fait de ses phrases longues et nerveuses, reste aussi provocatrice et déroutante que les ouvrages de naguère. Et laisse deviner (thème qu’il a développé longuement et avec beaucoup d’humour dans "L’homme qui parlait d’Octavia de Cadix" ce que furent les réactions de l’Université, lorsque dans les années 70, déferlèrent sur la France Alfredo Bryce-Echenique, Julio Cortazar, Gabriel Garcia-Marquez et autres Mario Vargas Llosa… 

           Jeanine RIVAIS

                                                                                                                                                    

(¹) Maximes et pensées, caractères et anecdotes. 1741-1794.

 

CE TEXTE A ETE PUBLIE DANS LE N° 51 DE JUIN 2004 DE LA REVUE DE LA CRITIQUE PARISIENNE.