LE MONDE FEERIQUE DE MARTHA GRÜNENWALDT.

(1910-2008)

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Martha Grünenwaldt
Martha Grünenwaldt
grünenwaldt 1
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Totalement autodidacte, Martha Grünenwaldt appartient à ces dames âgées (comme M’an Jeanne en France, La Vieille Dame en Hollande, bien d'autres…) qui, un jour, tout à fait par hasard, se sont mises à dessiner. Et qui, incapables désormais de s’arrêter, ont couvert (couvrent) des milliers de pages, de dessins infiniment beaux et riches ; de « dits » complètement libérés de tout souci de techniques ou de conventions ! Ainsi, en Belgique, cette créatrice a-t-elle à soixante-dix ans, commencé à dessiner en cachette, sur n’importe quels papiers, au dos d’affiches… avec les crayons de ses petits-enfants. Dès lors, elle a déployé une intense activité, et, avec beaucoup de fierté et de naïveté, distribué pendant longtemps aux passants, par la fenêtre de la maison de sa fille chez qui elle vit, une foule de dessins surprenants, jusqu’au jour où celle-ci s’en est aperçue et a décidé de conserver précieusement ces œuvres dans des cartons qui, très vite, sont devenus volumineux !

grünenwaldt 2
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Et quels dessins ! Aux crayons de couleurs, stylos à bille, encres… Et, avant même d’avoir perçu l’"histoire" portée par ces réalisations, quel régal pour les yeux du visiteur, que ces jeux de couleurs tendres et ces formes aux volutes compliquées ! Car, bien que très sûrement elle n’ait jamais entendu parler ni du mot ni du principe, l’effet cinétique que Martha Grünenwaldt a intuitivement découvert exige, par ses trames si particulières, ses équilibres et ses impressions de volumes si inattendus, un temps d’accommodation. Et puis, consciemment ou non, dans le foisonnement de ses traits apparemment dirigés en tous sens, mais en fait parfaitement ordonnancés, elle a également imaginé tout un réseau exploratoire : Comme naguère, sur les éphémérides, les enfants découvraient, à la fourche d’un arbre d’aspect anodin ici le visage d’un clown, là une tête d’animal… il faut s’approcher pour percevoir dans les bouquets polychromes de cette artiste, dans les cheveux/flammes de ses jeunes filles ou leurs têtes chapeautées…un fourmillement d’autres êtres délicats, d’individus lilliputiens, principalement des femmes, petites poupées-jouets, minuscules femmes-poupées émergeant d’un bouton de fleur, avec des robes et des coiffures très sophistiquées, des cheveux très ornés… Mais aussi des formes animales : groupées en des ensembles qui peuvent paraître aléatoires, mais qui deviennent le visage, la fenêtre, la tête de l’oiseau, le papillon ou le poisson se faufilant dans les fleurs, etc...

grünenwaldt 3
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A plus de quatre-vingt ans, Martha Grünenwaldt continue assidûment à dessiner et à peindre quotidiennement. N’y a-t-il pas là un beau conte dont la fée serait une vieille dame au cœur et à l’esprit plein de fleurs et de délicieuses fantasmagories ?

                                            Jeanine Rivais

CE TEXTE A ETE ECRIT EN 2002 A L'OCCASION DU FESTIVAL DE ROUEN : ART ET DECHIRURE et publié dans le N° 72 tome 1 de février 2003 du BULLETIN DE L'ASSOCIATION LES AMIS DE FRANCOIS OZENDA.